Il fait beau ce matin. Le soleil se lève déjà et commence à réchauffer le monde. J’imagine ses rayons qui éclairent les feuilles vertes des arbres. Celles-ci  arborant alors de doux reflets jaunes. Les gouttes de la rosée sont omniprésentes et permettent à une agréable odeur humide de flotter dans l’air. Ah, enfin une bonne journée qui s’annonce.

   Dans ce joli décor idyllique, j’avance tranquillement, suivant le sentier. Je me suis levé tôt ce matin, et ait donc quitté la sylve pour me dégourdir les pattes. D’ailleurs, malgré l’une d’entre elle, qui était il y a quelques jours encore bien amochée, qui me fait encore un peu souffrir, je marche d’un pas rapide. Quel plaisir de se retrouver à l’extérieur et de pouvoir gambader un peu.
   Je repense à ce soldat. C’est pour cela d’ailleurs que j’ai décidé de m’aventurer sur le sentier. Peut-être passera-t-il par-là ? Pas que j’aie vraiment envie de le revoir, mais au moins savoir comment il va. Je secoue la tête et sors de mes pensées. Je trottine, suivant toujours ce chemin si souvent emprunté par les humains. M’enfin, d’un naturel assez calme je ne m’inquiète pas.

   J’hume l’air. L’odeur et les bruits parasites de la ville se font de plus en plus présents. Il serait risqué de trop m’approcher, tant pis si je n’aperçois pas Kaï, je ne vais pas me risquer à pénétrer la ville ! Surtout que je commence à ressentir pas mal de félins. Felinaes, caméléons et bien sûr, une majorité de soldat. Mes poils s’hérissent sur mon dos. Comment ces esclaves des humains qui on le culot de se faire appeler des « soldats » peuvent-ils se regarder en face ? Je ne comprendrai jamais comment ces chats peuvent être fiers de leur existence.

   Soudain, je sens l’un d’entre eux, pas très loin. Nous sommes trop éloignés pour qu’il me repère mais moi je sais qu’il est là. Aucune idée de ce qu’il fou, peut être un guetteur ? J’hausse les épaules et décide de continuer mon chemin. Néanmoins, je bifurque légèrement du sentier. Je vais faire un petit détour pour ne pas faire de rencontre avec un inconnu. Le soldat est en plein milieu du chemin, les sens en alertes. Je le contourne par la droite. Mes oreilles et mon odorat concentrés sur ces réactions.  Il ne bouge pas. Moi je continue d’avancer.
C’est là que je l’entends, une voix, agressive et mauvaise qui lance :

- Décidément, on ne peut jamais être tranquille !

   Je me fige et reprend mes esprits. Tellement absorbé par le guetteur, je n'ai pas fait attentions aux êtres vivants plus proches de moi. Un félin… Non. Pas un félin mais un soldat est posté devant moi l’air mécontent. Sa silhouette est plutôt imposante, je dois l’avouer. Surtout qu’il m’a l’air plutôt hostile. Par simple réflexe instinctif je m’avance de quelques pas et feule, le laissant découvrir mes crocs. Malgré cela, je garde les griffes rétractées et essaie tant bien que mal de reprendre mon calme afin de lui répondre :

-Je ne te le fais pas dire.

   Je suis un peu nerveux mais ne le montre pas. Je me suis rarement trouvé si proche d’un ennemi inconnu pouvant me sauter à la gorge à tout moment. Néanmoins, s’il y a combat, c’est lui qui l’engagera, pas moi. Et j’aimerais bien qu’il n’y en ai pas ! Conservant un ton assuré et autoritaire, je lui lance :

-J’aimerais bien ne pas faire couler le sang aujourd’hui.

Il se met à rire. Un rire étrange, froid et se voulant totalement hautain. Je fronce le museau et réduis mes yeux à deux fentes. Je déteste quand un félin se met à rire après que j’ai pris la parole, ça me rappelle un peu trop cet enfoiré d’Isaac. J’hausse les épaules. Rire comme un débile est peut être une genre de signature des soldats ? Je laisse échapper un léger rire, fier de la pensée qui vient de me traverser l’esprit.

   Puis je reprends un peu mon sérieux. Je suis quand même face à un soldat entraîné qui ne pense qu’à une chose : trucider tous les felinaes qu’il rencontrera, et justement, un felinae, j’en suis un ! Je fixe sa silhouette d'un œil mauvais. C’est vrai qu’il est à la solde des humains, lui et moi pourront difficilement éviter un combat. Malgré la tension qui règne, je ne bouge pas, droit sur mes pattes les sens en alerte au cas cet idiot se mette à me foncer dessus, toutes griffes sorties.
Mais il n’en fait rien et s’arrête même de rire. Et je le sens totalement décontracté. Comme s’il s’en foutait de ma présence. A dire vrai, ça ne me dérange pas vraiment. Comme je venais de le miauler, je n’ai pas envie de faire couler le sang aujourd’hui. Cependant, si c’est sur un soldat nerveux et inconscient que j’ai croisé, cela me paraît impossible. Je soupire un bon coup et m’apprête à continuer mon chemin quand le matou balance :

- Ne pas faire couler de sang ? C'est mal connaître les Soldats abruti.

   Après ces mots, je sens le soldat tenter de devenir intimidant. Griffes et crocs à découverts, l’air qui l’entoure devient très électrique et la distance qui nous sépare est chargée de mauvaises ondes. Wow, il a vraiment la rage celui-là ! Il a dû passer une mauvaise journée. J’hausse les épaules et remue les moustaches. Puis, je prends mon courage à deux pattes et ne laisse passer aucune émotion. Je m’avance vers le soldat, totalement inexpressif comme j’aime l’être.
Je m’avance doucement, le regardant. Mes pupilles claires plongent dans ses prunelles. J’essaie tout simplement d’attirer son attention. Je me rapproche un peu plus du soldat, marchant vite. J'arrive enfin à sa hauteur, ma truffe presque collée à la sienne…

   Puis je baille un bon coup et passe à droite du soldat nonchalamment. Je me fous ouvertement de lui en ne réagissant nullement à ces puériles provocations. Je continue juste mon chemin comme s’il n’était pas là. Mon seul objectif de la journée c’est d’au moins apercevoir si Kaï se porte bien.

Up ♪

J'archive.