Noor, comme beaucoup de ses comparses, est né à l'Armée d'une mère Reproductrice. S'il eut vent de qui était son père, il n'eut jamais eu l'occasion de lui parler. Noor dit ne pas en souffrir. Qu'il a l'habitude et que, de toute façon, ces rêves d'une famille heureuse et aimante lui semblent impossibles dans ce monde dévasté. Que ses dires soient vrais ou qu'il ne le dise que pour enfermer son chagrin au plus profond de lui-même, le résultat est le même : Noor ne connaît pas et ne connaîtra jamais son paternel. Peut-être est-ce pour ça qu'il était si intimement lié à sa génitrice ; ou peut-être étaient-ils destinés à avoir une relation plus fusionnelle que la plupart. Une chose est certaine, c'est que beaucoup étaient étonnés par leur liaison. Noor était déjà un enfant surprenant : les chatons de l'Armée arrêtaient généralement de jouer aux héros très tôt en plus d'avoir une vision du héros parfait bien différente de la "normale". Après tout, ils étaient conditionnés à être soldat, à se battre, tuer, attraper, torturer, voire même séquestrer si besoin était. Mais Noor n'eut jamais de cesse de se clamer comme un héros qui sortirait chaque soldat de l'emprise des méchants Hommes, ce qui leur permettrait de retrouver une liberté que beaucoup trop n'ont jamais eu la chance de connaître.

D'où tenait-il tous ces rêves, toute cette ambition, cet optimisme, cette envie de faire le bien ?
Pour être honnête, lui-même n'a jamais vraiment su.

Il a effectivement un souvenir vague d'une rencontre avec un Caprae, alors qu'il était encore trop jeune pour se rendre compte de qui il était et ce que sa présence à la Caserne signifiait, mais n'a pas plus d'explications. Que ses rêves soient des fleurs, dont les racines sont fermement plantées au creux de son coeur depuis sa naissance ou qu'elles aient été plantées par quelqu'un d'autre durant sa tendre enfance, il ne saurait le dire. L'important est qu'à l'aube de ses 8 mois, il s'enfuit de l'Armée à la première occasion qu'il eut. Il était accompagné de sa chère mère, mais celle-ci revint sur ses pas à mi-chemin. Pour le protéger, disait-elle. Lui donner un alibi ; lui donner plus de temps avant que quelqu'un daigne le poursuivre. Noor voulut objecter, pensa même à rester, car quel bien ferait-il à partir s'il ne pouvait pas être avec la seule qui daignait l'approcher ? mais il faut croire qu'il tenait tout son entêtement de sa mère. Elle finit par avoir le dernier mot et retourna à la Caserne où il avait passé son enfance pendant que, lui, traçait maladroitement son chemin, suivant du mieux qu'il pouvait les fumets éphémères des Caprae.

Une de leur sentinelle finit par le trouver, et il se jugea chanceux de n'être tombé sur aucune créature, aucun soldat, ni même un Ophéis ou un solitaire passant par là. Ce fut pour lui un bon signe ; une preuve qu'il avait fait le bon choix. Depuis lors, Noor vit une vie plus ou moins paisible au Royaume. Mais il n'a pas oublié sa mère et n'attend qu'une chose : qu'Alec se décide enfin à organiser une libération et qu'il y participe pour pouvoir enfin la faire sortir de cet enfer et lui prouver que ses jeux d'enfant où il était un héros étaient un peu plus que de simples jeux après tout.