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« Un jour nous n'aurons plus à nous dire au revoir, seulement bonne nuit. » One Shot

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Anonymous
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   Sam 21 Oct - 21:27


Ce One Shot équivaut au départ d’Opaline, vu par les yeux de Kaïgaan. Nous nous sommes mises d’accord sur le contexte et sur les paroles et faits d’Opaline, afin qu’elle puisse partir sans avoir besoin de rp et pouvoir revenir un jour. Et c’est très cliché. Éoué.
J'espère que vous aimerez le lire comme j'ai aimé l'écrire ♥️




Kaïgaan était resté dans sa chambre toute la matinée. Non pas par simple fainéantise, mais par réelle fatigue. En effet, il était sorti tard la veille, appréciant de plus en plus les balades nocturnes, plus enclines à le mettre sur la route d’un Felinae tout en évitant les soldats. Le mâle gris aimait la fraicheur de la nuit, son calme, parfois contrecarré par Gwei qui hurlait à la belle étoile. Mais il appréciait ce tableau, c’était ainsi qu’il se sentait le mieux. Les paysages assombris l’aidaient à se recentrer, à se calmer, à mieux appréhender les journées si dures et militaires qu’il vivait à la caserne. Le contraste entre ces deux univers était très fort, le confortant dans son idée que la vie de Felinae ne serait peut-être pas si difficile que ça.
Et puis, si le plan de Gwei et lui visant à libérer les prisonniers fonctionnait, Kaïgaan quitterait vraiment les soldats. Ce n’était plus un mythe, un espoir irréalisable ou un conte à raconter à ses amis. Ce jour allait arriver, et plus rapidement qu’il ne le pensait. Un jour, le soldat sera libre. Il savait qu’il ne serait ni le premier, ni le dernier à quitter son rang, partant vivre dans la nature avec ceux qu’il avait toujours chassé. Mais comme à chaque fois, quelque chose de facile devenait extrêmement compliqué dans la tête du tigré noir. Pessimiste, il imaginait le pire. Réaliste, il savait que le pire pouvait bien arriver. Ils pouvaient échouer, se faire capturer, il pourrait être refusé chez les Felinaes ou carrément mourir. Pourtant, il se répétait souvent les paroles de Gwei, qui arrivait si facilement à lui redonner le moral, à le remotiver. Ils étaient comme nuit et jour, calme et énergique, raisonnable et enthousiaste.
Mais rien ni personne ne saurait l’aider à affronter ce qui allait se passer ce jour-là.

Il devait être 13h, le soleil était haut dans le ciel et illuminait la chambre de Kaïgaan de ses doux rayons. L’air était chaud sans être lourd et on entendait quelques feuilles danser au rythme du vent malgré la fenêtre à peine ouverte. De temps à autres, un oiseau chantait, faisant profiter à quiconque le voulait sa douce mélodie. Mais la plupart des soldats n’étaient pas du genre à s’attarder sur la nature. Pour eux, ce n’était qu’un beau jour pour s’entrainer. Kaïgaan n’était pas non plus un grand amoureux de la nature, s’émerveillant devant chaque brin d’herbe. Mais à force de marcher dans la forêt et de côtoyer des chats habitués à y vivre, il faisait plus attention à ce qu’elle pouvait lui offrir. De bon comme de mauvais d’ailleurs. Il se plaignait souvent de la cruauté de ses collègues, mais il avait pu maintes et maintes fois observer la dure réalité de la nature où seule la loi du plus fort est en vigueur. Des ours, des insectes, des chiens… Mais toutes ces batailles contre ces bêtes avaient été menées en compagnie de ce qui était maintenant ses amis. Ses amis… Et Opaline.
Il n’arrivait pas à arrêter de penser à la belle Felinae. Sa fourrure immaculée, Ses yeux de braises, ses flammes brûlantes illuminant la nuit ténébreuse. Sa moue boudeuse, son humour moqueur, sa fierté craquante, sa voix mélodieuse, son courage de lionne. Face aux chiens, elle avait réagi avec une force d’esprit que le soldat n’aurait jamais imaginé prêter à une femelle à l’allure aussi douce. Mais elle s’était battue. Ironiquement, elle avait été plus terrifiée par l’orage grondant que les chiens mutants. Et étrangement, la petite faiblesse de la formidable féline faisait encore plus craquer Kaïgaan.
Pourtant, il avait encore du mal à admettre ses sentiments. Le soldat n’était pas idiot, il savait bien qu’il était amoureux. Comment expliquer cette chaleur brûlant dans son corps lorsqu’il pensait à elle, le fait qu’elle ne quitte jamais son esprit, qu’il ne se souvienne que de la beauté de son sourire alors qu’il avait été gravement blessé par les chiens ? Si ce n’est qu’il était complétement et éperdument épris d’elle…

Mais Kaïgaan ne serait pas lui-même s’il ne passait pas son temps à s’obscurcir l’esprit. Comment une chatte aussi merveilleuse pourrait vouloir d’un horrible soldat, trop lâche pour ne pas quitter ce camp de meurtrier ? Comment la beauté pourrait-elle être associée à un monstre pareil ? Le félin électrique se répétait qu’elle ne voudrait jamais de lui, qu’il rêvait en vain. Tout cela n’était qu’une idylle perdue d’avance.
Sa raison lui disait qu’il n’avait aucune chance, qu’il devait se faire à l’idée qu’un soldat ne pourrait jamais vivre le bonheur en compagnie d’une Felinae, qu’il n’était pas assez bien pour quelqu’un d’aussi parfait. Mais son cœur, se serrant dans sa poitrine et chauffant son corps d’une étrange façon, lui affirmait qu’il ne pourrait se passer d’elle, qu’il ne pourrait jamais passer à autre chose, à la laisser partir sans au moins tenter sa chance.
Couché sur son lit, identique à chaque chambre, il se tournait, se retournait, sans que l’image de la belle blanche ne s’efface de son esprit. Il ne voulait plus libérer les prisonniers pour devenir Felinae, il voulait le faire pour pouvoir vivre avec elle, sans jamais la quitter. Kaïgaan avait du mal à se concentrer sur sa mission avec Gwei, obsédé par celle qui avait littéralement illuminé sa nuit. Le félin n’était pas un sentimental d’ordinaire et se définissait lui-même comme assez froid et dur. Mais sa carapace de soldat combattif fondait par la chaleur de ses sentiments. Il était ce genre de chat à avoir un coup de foudre, à être totalement amoureux, à s’en rendre malade. A chaque sortie en forêt, il n’espérait que la voir, rire avec elle, se moquer gentiment et se laisser railler à son tour, jouer comme un chaton puis l’enlacer tendrement, chasser maladroitement, discuter pendant des heures, observer chaque centimètre de son corps…

Un cri résonna dans le couloir, faisant quitter ses pensées sentimentales au soldat. Ce n’était pas un cri de douleur ou de peur, mais bien de victoire. S’en suivit un deuxième, d’un autre chat. Vinrent ensuite des bruits de chats courant dans le long couloir donnant accès à toutes les chambres. Kaïgaan dressa les oreilles, histoire de savoir quelle était la raison d’un pareil vacarme. Une trouvaille particulièrement intéressante ? Une bagarre impressionnante ? Une capture unique ? Tsss, ces chats s’excitaient pour rien. Le soldat soupira et se décida enfin à se lever, ne voulant pas ignorer l’objet d’une telle jouissance.
Il sortit de sa chambre, passant premièrement sa tête puis ses pattes avant. Quand un soldat passa, il l’arrêta brusquement, son regard dur témoignant de son sommeil agité. Fort heureusement, le matou qu’il venait de stopper était trop enjoué pour se braquer devant la froideur de son camarade. Il était noir et blanc, de petites cornes poussant sur sa tête ronde. Visiblement, il était très jeune. Kaïgaan n’attendit pas une seule seconde et demanda d’un ton las, entre l’agacement et la fatigue :

« Qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi tout le monde hurle et court comme des dératés ? »

Le jeune félin sautilla et son regard ambré s’illumina quand il répondit d’un ton innocent, un sourire enfantin naissant sur son visage.

« Une patrouille a capturé trois Felinaes ! Il parait qu’ils sont trop bizarres… »

Kaïgaan inspira en vue de soupirer. Autrefois, il voyait lui aussi les Felinaes comme des chats bizarres. Pourquoi vivre aussi difficilement en risquant sa vie à chaque sortie du camp alors qu’ils pouvaient profiter du confort et de la sécurité de la vie de soldat ? Aujourd’hui, les rôles s’étaient inversés. Le matou électrique respectait les chats sauvages, leur courage face au danger et leur volonté de sauver les captifs. Il se dénigrait, vile soldat tortureur qu’il était, pour ne pas avoir songé à les aider avant. Mais Kaïgaan n’eut pas le temps d’expirer en soupir l’air qu’il venait d’inspirer, car le jeunot ajouta d’un ton émerveillé :

« Y’en a même une qui a des flammes sur les oreilles ! »

Il ria et contourna le matou pour rejoindre ses camarades qui se regroupaient déjà à l’extérieur de la caserne.
Kaïgaan avait écarquillé les yeux, incapable de répondre. Son cœur s’était arrêté et il était persuadé qu’une partie s’était brisée. Il respira difficilement et tourna lentement sa tête vers l’endroit où avait disparu le jeune chat. Non, cela ne pouvait pas être l’évidence. Une seule chatte correspondait à cette description, et c’était bien sûr Opaline. Reprenant ses esprits en secouant la tête, Kaïgaan couru à son tour vers la sortie. Ses dents étaient si serrés que sa mâchoire aurait pu le faire souffrir si toutes ses pensées n’étaient pas dirigées vers une seule personne. Son cœur battait plus vite qu’il ne l’avait jamais fait. Plus vite que lors de sa fuite contre le korth, plus vite que lors de sa bataille avec les chiens mutants.
C’était la première fois que son cœur ne battait pas pour lui, mais pour quelqu’un d’autre. La première fois qu’il se sentait mourir sans être en danger.
Lorsqu’il sortit de la caserne, la lumière du soleil l’ébloui brutalement. Clignant plusieurs fois des yeux, il bouscula sans vergogne les félins attroupés devant le bâtiment, ignorant les feulements et autres protestations. Tous les soldats réunis allaient de leur petit commentaire, ce qui rendait Kaïgaan toujours plus paniqué et hors de lui.

« Bien fait pour eux. »
« Ils le méritent. »
« Ils devraient tous crever. »
« Belle prise ! »
« On devrait garder la minette blanche, elle serait pas mal en reproductrice. »
« Regarde-les, ils ne savent même pas ce qui les attendent haha ! »
« Il parait qu’ils vont dans un autre camp, plus au sud. »


A chaque phrase, Kaïgaan sentait son cœur voler en éclats et ses griffes ne demandaient qu’à se planter dans le visage de ces monstres. Ils n’étaient que des monstres, ils ne savaient pas les horreurs que vivaient les Felinaes, le courage qu’ils avaient et à quel point celle qu’ils étaient si fier d’avoir capturée comptait pour Kaïgaan. Mais son corps ne réagissait plus. Il se contentait de pousser, bousculer, ouvrir un passage vers ce que tout le monde acclamait joyeusement. Le soldat électrique ne voyait même plus ses collègues, devenus une masse informe, un simple rempart devant celle qu’il aimait. Sa respiration était saccadée, ses pattes le brulaient et sa vision devenait comme floue, uniquement concentrée sur ce qu’il se passait devant lui. Il finit par voir le haut de la cage, puis les barreaux, jusqu’à ce qu’il parvienne enfin à accéder au-devant du groupe, prenant une bouffée d’oxygène en sortant du regroupement.
Puis il la vit enfin. Elle était dans une minuscule cage, accompagnée de deux autres Felinaes. Ceux-ci ne parlaient pas, acceptant leur sort, assez expérimenté pour savoir que lutter contre la folie humaine serait inutile. Ils étaient cloitrés dans le fond de la cage, alors qu’une chatte blanche se déchainait devant eux. Fidèle à son caractère de lionne, Opaline était une vraie furie. Elle feulait rageusement, le regard rempli de haine, comme s’il pouvait brûler tous ceux qui se tenaient devant elle. La Felinae regardait chaque soldat avec une colère palpable, montrant les crocs à quiconque lui parlait. Lorsqu’un soldat s’approchait de trop près, elle sortait ses pattes blanches des barreaux et essayait de le griffer sans aucune retenue. Pourtant, elle semblait essoufflée et même si sa vivacité était impressionnante, elle était moins énergique que lors de leur première rencontre. Il ne fallut pas longtemps à Kaïgaan pour deviner qu’elle avait certainement déjà utilisé son pouvoir. Il avait vu les conséquences de son activation, et il se doutait bien qu’elle l’avait encore plus utilisé face à toute une patrouille. Il la regardait alors qu’une myriade d’émotions se bousculait en lui. Il était dans une rage folle, ses griffes crissant sur la terre rendue si dure au fil des années. Son cœur se serrait violement dans sa poitrine et chaque battement semblait douloureux, si bien qu’il l’entendait presque battre dans ses oreilles.
Un félin brun rayé de vert se tenait devant la cage, à une distance assez raisonnable pour ne pas se prendre de coup de griffe de la part d’Opaline. Il était plutôt massif, sûr de lui, visiblement le portrait typique du soldat égocentrique et bagarreur. Il tentait de la griffer sans y parvenir, reculant à chacune des répliques de la femelle, comme si tout cela n’était qu’un jeu. Il affichait un sourire vicieux, montrant bien qu’il s’amusait à lui faire perdre espoir. Kaïgaan dressa instinctivement les oreilles quand il fut assez près pour entendre sa voix.

« Allez ma jolie, tu devrais rejoindre nos rangs… On saurait changer l’affreuse sauvage que tu es. Ah, tu ferais une bien belle reproductrice, les mâles se bousculeraient pour toi. Allez, ne me dit pas que je ne te donne pas envie… »

Kaïgaan n’en pouvait plus. Il s’imaginait déjà étriper ce sale rat d’égout, lui faire regretter d’avoir osé poser un regard plein d’envies malsaines sur celle qu’il aimait. Mais Opaline fut plus habile. Pas assez attentif, le soldat s’était un peu trop rapproché, aveuglé par son égo surdimensionné, et il n’en fallut pas plus à la Felinae pour lui donner un violent coup de griffe au visage. Le sang gicla et les chats les plus proches purent même entendre la chair se déchirer. La troupe de soldats émis ensuite un mélange de rire et de surprise, alors que le griffé recula d’un pas, passant sa patte sur sa blessure. Elle n’était pas belle à voir, Opaline ne l’avait pas raté. Il avait l’air choqué. Choqué qu’un Felinae ait pu oser poser la patte sur lui. Mais plus que tout, une colère commença à croitre en lui, laissant son regard se rougir de colère et ses crocs se dévoiler.
Soudainement, il leva la patte, ses longues griffes sorties vers le ciel. Son regard était brulant de haine et il ne comptait pas s’arrêter à une simple griffure… Il rabaissa rapidement sa patte vers la cage, alors qu’Opaline ne pouvait reculer pour esquiver. C’est alors que le temps s’arrêta dans l’esprit de Kaïgaan, il ne lui en fallait pas plus pour réagir. En une seconde, il sauta de sa position et vint percuter violemment le matou brun, le déséquilibrant avant de le mordre brutalement à la nuque, le secouant avant de le jeter avec tant de rage que le malheureux roula sur quelques mètres. Le soldat électrique fut lui-même surpris d’être capable de tant de force. Mais il ne s’arrêta pas sur le pouvoir de l’adrénaline. Kaïgaan feula rageusement, griffes sorties, sentant l’électricité chatouiller ses membres. S’il fallait le tuer, il l’aurait fait sans remord. Mais sous le coup de l’adrénaline, de la colère et de la peur, le félin gris ne chercha même pas à savoir s’il se relèverait, à se méfier de lui ou à agir de façon raisonnable, comme il l’aurait toujours fait. Non, son esprit était uniquement tourné vers Opaline. Il tourna la tête vers elle, alors que la troupe le regardait, immobile. Mille et une questions se bousculaient dans sa tête mais une seule phrase sortie de sa gorge sèche.

« Opaline… Je suis désolé… »

Toute la rage qu’il avait ressentie une seconde plus tôt venait de se transformer en tristesse, en regret. Son cœur se serrait, au même titre que sa mâchoire qui ne pouvait prononcer d’autres mots. Il aurait aimé lui demander si elle allait bien, si les soldats ne lui avaient pas trop fait mal, mais il savait que la réponse ne serait pas ce qu’il aurait préféré entendre. Il aurait voulu la délivrer sur le champ et s’enfuir avec elle, griffant rageusement chaque soldat sur son passage, mais il savait qu’il ne pouvait rien faire contre la force de l’acier. Alors il la regardait, sentant son cœur se réduire en morceaux, priant pour qu’elle ne lui en veuille pas pour faire partie du camp qui l’avait condamnée.

« Kaï ! Oh je suis si heureuse ! »

Kaïgaan n’eut pas le temps de réagir qu’elle sortit ses pattes de la cage, lui attrapant doucement la tête en posant délicatement ses pattes sur ses joues noires. Elle n’avait pas l’air contrariée, ni apeurée, juste heureuse de le voir.

« Je suis partie si vite l’autre jour, je ne t’ai même pas remercié… »

Le soldat était réellement surpris de la voir aussi douce, sa bouche s’entrouvrant légèrement, toutefois incapable de prononcer le moindre son. Elle posa lentement son front contre celui du mâle qui s’était approché et ferma les yeux, alors que celui-ci sentait son cœur se serrer. Pourtant, le poids lourd et froid qui pesait sur sa poitrine devenait soudainement plus léger. Sa tristesse et sa peur se changeaient en bonheur de pouvoir la voir, la toucher, lui parler. Elle ne lui en voulait pas…
Opaline était si parfaite. Malgré ce qu’il lui arrivait, elle restait fougueuse, combattante, mais d’une douceur infinie. Jamais il n’aurait pu rencontrer une chatte aussi merveilleuse, et jamais il n’en rencontrera d’autre. La Felinae était unique, et elle aurait toujours une place unique dans le cœur du soldat.

« Eh oui, j’me suis faite choper par ces crétins de soldats. Au fond je me suis dit que ce n’était pas plus mal et que je serais à tes côtés… Mais le destin a fait sa tête de mule, je ne sais même pas où je vais aller ! »

Elle soupira, seul signe de détresse. La belle enflammée était si forte, et lui sentait tout son être se déchirer devant cette affirmation. Elle allait partir, très loin, alors qu’il la retrouvait enfin. Il n’y avait là aucun espoir. Uniquement une séparation déchirante, horriblement douloureuse.
Kaïgaan avait tant pensé, tant cogité sur ce qu’il allait faire une fois devenu Felinae. Et il ne voyait son avenir qu’avec cette femelle blanche. Tout le reste n’était que surfai, inutile. Sa vie n’aurait de valeur que si elle se trouvait à ses côtés. Et on la lui prenait.

« Opaline… »

Il était uniquement capable de répéter son nom, alors que des myriades de phrases bouillonnaient dans sa tête. Il ne pouvait pas la voir partir, il n’y survivrait pas. La seule chatte qu’il ait aimé, la seule qui l’ait fait se sentir important, fort, plus qu’il ne l’avait jamais été… Elle disparaissait, emportée par les Hommes pour qui il se battait depuis la naissance.

« Tu vas terriblement me manquer Kaï... »

La cage commença à se soulever et le mâle compris avec un coup d’œil sur le côté que deux humains la portait, bousculant les trois chats qui se trouvaient à l’intérieur. Ils ignoraient totalement la discussion que pouvaient avoir les deux félins. Ils ne pouvaient pas comprendre leur langue, ni la force des sentiments qui les unissaient. Sentiments qu’ils déchiraient par leur folie.

« Mais ne t’en fais pas, j’arriverais à m’échapper et à revenir ici, promis ! »

Alors que les deux chats allaient être séparés à jamais, ils s’approchèrent instinctivement l’un de l’autre, luttant contre leur horrible destin, et leur truffe se frôlèrent. Ce contact si doux humidifia les yeux bleus de Kaïgaan, qui vit Opaline être déposée avec les autres prisonniers dans un camion de transport. Le véhicule était gris métallisé, ouvert à l’arrière afin de permettre le transport de toute sortes de marchandises. Cela devait être un véhicule militaire, transformé pour servir au transport de cobayes.
Le soldat pouvait toujours la voir, mais il lui serait désormais impossible de la toucher. Leur dernier contact physique avait été ce geste tendre, que le soldat aurait voulu partager pendant des heures, enlacés dans un nid.
Opaline ne savait même pas où elle serait amenée, et elle parlait déjà de s’échapper et revenir ici… Son courage et sa force inébranlable contrastait avec tout l’espoir que Kaïgaan venait de perdre, réduit à néant par la réalité. Il voulait y croire, tout comme elle. Il priait de tout son être pour qu’elle y arrive, qu’elle le rejoigne le plus vite possible… Mais peut-être ne disait-elle cela que pour le rassurer, pour entretenir un espoir qu’ils savaient vain.
Un instant après que la cage fut déposée dans le camion, celui-ci démarra, produisant fumée et vacarme mécanique. Opaline fit une nouvelle fois entendre sa voix, criant par-dessus les bruits assourdissants.

« Merci pour tout Kaï ! »

Elle commença à s’éloigner, ses flammes dansant au gré du vent que déplaçait le camion. Même dans cette situation, elle était magnifique, parfaite. Son sourire adorable qui cachait un voile de tristesse devant ses merveilleux yeux de braise. Son courage devant les deux autres prisonniers qui avaient déjà abandonné… Elle était parfaite. Mais elle disparaissait.
Non…
Non, pas comme ça !
Kaïgaan bondit sur ses pattes et couru après le véhicule, ses griffes perçant la terre à chaque foulée. Ses yeux étaient rivés sur Opaline, comme s’il craignait que la lâcher du regard la fasse disparaitre à jamais. Courant comme il ne l’avait jamais fait, il réussit à sauter sur le camion, s’agrippant au planché, les pattes avants vissées sur le métal alors que le reste de son corps pendait dans le vide. Ses griffes crissaient sur le métal et il battait des pattes arrière pour trouver un appui, alors que la terre défilait sous lui. Par le plus grand des miracles, il réussit à s’immiscer dans le camion, poussant sur ses pattes arrière avant de rouler au sol. Dans n’importe quelle autre situation, son corps entier lui aurait fait gouter à la fatigue d’une telle cascade, mais l’adrénaline qui le secouait lui donnait assez d’énergie pour vaincre tous les monstres de la forêt si cela lui permettait de retrouver celle qu’il aimait. Dans le camion, il se tourna immédiatement vers Opaline, plongeant ses yeux dans ses prunelles de braise avec passion.

« Je t’aime. Je t’aime comme je n’ai jamais aimé personne. Et il est hors de question que je te laisse partir. »

Kaïgaan n’avait jamais parlé de cette façon. Avec autant de passion, de force, de détermination. Une seconde s’écoula avant qu’il ne s’attaque au cadenas, aux barreaux, aux chaines qui retenaient la cage. Il mordait avec rage tout ce qui pouvait le séparer d’Opaline. C’était inutile, il le savait. N’importe quel idiot le savait. Mais il tentait tout ce qu’il pouvait tenter, n’agissant qu’avec la rage du désespoir.
Le camion continuait de rouler, d’accélérer et bientôt, les bâtiments gris et métalliques furent remplacés par des arbres feuillus, éclairés par les doux rayons du soleil. Ils venaient de pénétrer sur le sentier. Ils s’éloignaient de la ville, de leur monde. Opaline allait partir dans un endroit lointain, inconnu, et il ne la verrait plus jamais. Leur histoire venait à peine de commencer, comment pouvait-elle se finir aussi rapidement, aussi facilement ?
Kaïgaan sentait ses crocs crisser sur le métal alors qu’il tirait sur le cadenas fermant la porte de la cage. Cela aurait dû lui faire mal, mais il ne sentait plus rien. Ou peut-être que son cœur le faisait tellement souffrir qu’il ne ressentait plus rien d’autre. Le soldat sentait sa gorge se serrer alors qu’il comprenait enfin qu’il ne pouvait rien faire. Qu’il était inutile. Qu’il n’allait pas pouvoir la sauver.
Il leva lentement la tête vers Opaline, le regard désespéré, brisé. Le camion roulait de plus en plus vite sur le sentier rugueux, faisant remuer sa cargaison lorsqu’il passait sur les bosses. Pourtant, ce n’était pas ces mouvements brusques qui faisaient tourner la tête de Kaïgaan. Son regard était focalisé sur Opaline, mais il sentait que ses forces le quittaient. Elles abandonnaient. Il allait la perdre, et le savoir lui donnait des vertiges. Ce sentiment de désespoir profond, insoutenable, qui écrase violement toute trace d’espoir. Alors il regardait la belle chatte blanche, comme pour imprimer chacun de ses traits dans son esprit avant de la perdre pour toujours.
Opaline ouvrit lentement la bouche. Elle allait parler, enfin lui répondre. Il avait fait sa déclaration dans une réplique tellement cliché qu’il s’était surpris lui-même mais elle n’avait encore rien dit. Il n’avait pas vraiment fait attention à sa réaction, cherchant immédiatement à la libérer. Savoir si elle l’aimait ou non n’avait pas été la première priorité. Mais maintenant qu’il comprenait qu’il ne pouvait rien faire pour la faire sortir de cette maudite cage, il n’avait plus qu’à la regarder, l’écouter.

Mais au moment où elle allait enfin lui répondre, il sentit le sol se dérober sous ses pattes. Le camion venait de passer trop rapidement sur une bosse du sentier, ce qui l’avait fait bouger violement. Les cages et autres caisses, bien attachées, étaient restées en place mais Kaïgaan n’avait pas eu le temps de s’agripper. Surpris par la secousse, il fut déséquilibré et jeté en arrière. Ses griffes crissaient sur le métal, cherchant par tous les moyens à rester près d’Opaline. Mais en une seule seconde, il ne put qu’entendre le son de sa voix féminine sans en comprendre les paroles, avant de tomber violement du camion.
Il fut jeté durement à terre, roulant au sol dans la poussière soulevée par le véhicule. Il se releva rapidement, trop surpris pour sentir ses côtes lui faire mal. Ses yeux s’écarquillèrent quand il vit le camion s’éloigner rapidement dans un vacarme assourdissant, devenant de plus en plus silencieux au fur et à mesure qu’il disparaissait sur la route de la forêt.

« Opaline ! »

Ce simple cri laissait transparaitre toute sa détresse, tout son désespoir. Kaïgaan se mis à courir sur la terre malmenée sur sentier. Ses pattes frappaient le sol dur alors que son souffle saccadé lui brûlait les poumons. Il courait comme il ne l’avait jamais fait. C’était peut-être la première fois qu’il ne courait pas pour fuir, mais pour rattraper. Il y avait encore un espoir, le camion était encore visible. Les arbres défilaient à toute vitesse alors que le soldat gardait ses yeux rivés sur le monstre de métal emmenant celle qu’il aimait par-dessus tout. Mais au bout de quelques secondes, le camion disparut définitivement, trop rapide pour le simple chat qu’il était.
Kaïgaan ralentit, puis s’arrêta, fixant l’endroit où le camion avait disparu. Ça y est. C’était fini. Il ne la reverrait plus jamais, elle avait été enlevée, amenée loin d’ici mais les Hommes qu’il servait depuis sa naissance. Son cœur battait la chamade suite à sa course effrénée et il sentait ses pattes le picoter, comme si elles couraient encore. Un vent frais vint faire danser les feuilles des arbres, sur lesquels les oiseaux étrangement silencieux regardaient le félin. Le soldat se sentit monstrueusement seul. Seul dans cette forêt immense. Et rien n’avait changé. Opaline était partie à jamais, mais la vie, le monde allait continuer de tourner comme si elle n’était qu’un dommage collatéral, une simple perte pour le bien des humains.

Le mâle gris serra soudainement les dents avant d’hurler, frappant une touffe d’herbe avec violence, faisant s’envoler de terreur les oiseaux. Il voulait être en colère. Il voulait rattraper ce maudit camion. Il voulait rentrer à la caserne et tuer tout ce qui l’avait privé de sa bien-aimée. Mais il ne ressentait pas de la colère. Pas autant qu’il ne l’aurait voulu.
Non, Kaïgaan était brisé.
La simple tristesse ou même le désespoir n’était pas assez grand pour décrire ce qu’il ressentait à cet instant précis. Il était amoureux, fou amoureux. Pour la première fois de sa vie, il s’était dit qu’il pourrait être heureux, qu’une belle chatte pouvait vouloir de lui, qu’il s’enfuirait pour la rejoindre et qu’ils fonderaient une famille dans la sylve. Il rirait sur ses maladresse, elle se moquerait gentiment de lui. Ils auraient des moments tendres, allongés sur l’herbe douce de la prairie. Ils se seraient parfois disputés, mais toujours réconciliés. Il aurait été bêtement jaloux qu’elle parle à d’autres mâles, mais elle l’aurait toujours rassuré.
Mais tout ça resterait un rêve à jamais. Il l’avait perdu, comme il avait perdu son avenir qu’il ne voyait pas autrement qu’avec la belle aux oreilles de feu. Maintenant il n’avait plus rien. Plus de futur. Il n’était qu’une enveloppe vide, un corps sans âme. Il se sentait complétement brisé, vide, mort.

Et maintenant ? Qu’allait-il faire ? Pourquoi s’enfuir, pourquoi rejoindre les Felinaes, alors qu’Opaline n’y était plus ? Il n’avait plus aucune raison de fuir, ni même de se battre, puisque sa seule raison de vivre ne faisait plus partie de son monde.
Tel un simple robot retournant chez lui, Kaïgaan commença à marcher jusqu’à la caserne. Son cœur n’avait jamais été aussi lourd, tout comme ses pas. Il trainait les pattes, n’ayant plus la force de les soulever pour ne pas faire s’envoler la fine poussière. Sa queue baisse trainait au sol. Le félin avait le regard vide, c’était à peine s’il regardait où il mettait les pattes. Il sentait un froid intense lui parcourir le ventre, prenant sa source dans la poitrine. Il était trop choqué pour pleurer, même si sa gorge le serrait affreusement. Tout était arrivé si vite. Quelques minutes auparavant, il pensait encore pouvoir vivre avec elle dans ce monde horrible. Et tout était parti en fumée, envolé. Il n’avait plus qu’à retourner chez lui, sans avoir de but ni d’avenir. Le soldat rentrait dans ce maudis bâtiment dans lequel il avait grandi, anéanti.
Le soldat… Cela sonnait comme une farce. Il était resté aux côtés des Hommes par peur de mourir, et ils venaient de lui faire perdre sa raison de vivre. La vie avait parfois un humour ironique, horrible et mortel. Et cette fois, Kaïgaan en avait fait les frais.
Il était brisé, changé à jamais.
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