Il était déjà tard quand j'étais parti. Mais il fallait apparemment refaire les stocks de certaines plantes, et ce assez tôt avant que le froid ne revienne altérer leurs vertus de son étreinte glacée. J'étais donc parti de bonne heure en direction du marais, ce qui ne m'avait pas empêché d'arriver assez tardivement, puisqu'à en juger les teintes que prenait le ciel, le soleil se couchait déjà. Je m'estimais cependant heureux, puisque j'allais pouvoir me balader un peu de nuit, me guidant avec les étoiles comme " au bon vieux temps ".

Revigoré par cette pensée, j'accélérai le pas. L'herbe sèche sous mes pattes s'adoucissait au fur et à mesure que je me rapprochais des dis marais. Je sentais d'ors et déjà le tapis vert sous mes pattes devenir plus tendre, la terre devenir plus meuble, et l'air plus humide. L'odeur quelque peu repoussante de la vase venait au fur et à mesure de ma progression envahir mes narines.

Bien - pensais-je - c'est parti pour la chasse aux plantes...

J'avais une image très précise de ce que je devais trouver. L'image des végétaux était gravée dans mon esprit pendant que je m'enfonçais dans ce lieu à l'allure désolée. De grandes tiges vertes s'élevaient d'une eau stagnante, à la couleur peu engageante. Un bourdonnement léger d'un insecte quelconque résonnait doucement dans mes oreilles, sans doute caché dans l'un des nombreux fourrés vert foncé aux baies écarlate. Un peu partout se trouvait des flaques de boues, dans lesquelles il fallait faire attention à ne pas mettre les pattes au risque de s'embourber. Les imposants troncs des arbres environnants, couverts de mousse, empêchaient quant à eux de voir à plus de sept ou huit mètres devant soi.

C'était donc dans ce lieu que l'on pouvait qualifier de repoussant que j'allais devoir ouvrir l'oeil pour trouver tout ce dont j'avais besoin. Il fallait pour cela que je forme une sorte de parcours, sautant de rochers en rochers, cherchant l'endroit où la terre était la moins boueuse ou prête à s'enfoncer dans la vase pour avancer correctement. Mais heureusement, la chance me sourie lorsque j’aperçus au loin les fleurs bleu de l'une des plantes que je devais ramener. Avec un petit sourire triomphant, je m'approchais aussi vite que je le pouvais de mon objectif. Je faillis tomber deux ou trois fois dans la gadoue, mais me rattrapais à chaque fois de justesse.

Et enfin ! Arrivé près de ses jolies plantes, je commençais à couper les tiges avec soin, déposant un petit tas à côté de moi. Une...Deux...Trois...Quatre... Ma réserve de fortune grandissait, lorsque soudainement, j'entendis un bruit près de moi.

« Il y a quelqu'un? »

Ce n'était pas un bruit, c'était une voix. Les oreilles dressées, je laissais mon petit tas à sa place, et contournais quelques arbres qui me bouchait la vue de l'endroit d'où venait la personne ayant parlé. Je me tapis derrière un buisson, sortant discrètement la tête. A peut-être deux mètres devant moi, se trouvait une femelle grise, avec quelques marquages noirs. Le haut de sa tête était coiffé d'un bonnet, et des colliers étranges entouraient son poitrail. Mais le détail qui m'attira, c'était l'une de ses pattes. Elle était rouge. J'inclinai la tête sur le côté, sans rien dire, enfouissant légèrement ma tête dans mon écharpe.

-Oui, moi. Qui es-tu? demandais-je d'une petite voix.