Le ciel était sombre cette nuit-là. Pas un nuage dans la toison argentée, ne venait troubler les rayons d’argent qu’envoyait la lune sur les flaques d’eau encore visibles au sol, les teintant d’attrayants reflets blafards. J’aurai presque pu ignorer les horreurs qui se déroulaient, à quelques dizaines de mètres sous mes pattes. La voûte céleste était si calme, pendant que la Terre se révoltait du mieux qu’elle pouvait. Une telle ironie m’arrachait un léger sourire, que je voulais cacher sans y parvenir pour autant. Je pouvais apercevoir les arbres tomber sur les routes bitumées et fracassées, écrasant les voitures et les petites maisons en bordure des rues détruites, comme de vulgaires lucioles que l’on aurait attrapées dans le creux de notre patte, avant de serrer le poing. Je voyais les gens courir à droite et à gauche, les femmes hurlant à leurs enfants de rester près d’elles, pendant que les hommes cherchaient vainement à faire démarrer leurs automobiles déjà broyées par la force titanesque des troncs qui s’étaient jetés sur la carrosserie de leurs biens. Le sol tremblait de toutes ses parcelles, fissurant d’avantage les trottoirs où du goudron avait fondu, ainsi que les allées et ruelles noyées sous la foule d’humains qui arpentaient chaque recoin à la recherche d’un endroit sûr.
J'ouvris les yeux en sursautant, perdue. Encore ce rêve ; ou plutôt, ce cauchemar. Toujours le même. Je me retrouvai sous la forme d'une sorte d'esprit, survolant une ville qui n'était plus que chaos et panique. C'était comme si je vivais quotidiennement la panique qu'avaient vécu les Hommes durant la Guerre. Ne sachant où je me trouvais, je jetai quelques regards apeurés autour de moi. J'étais seule, personne ne m'accompagnait. Je me souvenais alors m'être endormie dans la Forêt Empoisonnée, plus précisément, proche de l'orée. J'avais eu énormément de chance de ne pas me faire arracher les tripes par quelque chose qui se serait fait un malin plaisir à m'ôter la vie durant mon sommeil. Je me redressai doucement, laissant l'herbe craquer sous mes pattes. Autour de moi, les arbres étaient plus colorés, moins détruits. Il parait qu'il y a déjà très temps, florissaient, orgueil de nos sentiers, certain vastes et lumineux champs de fleurs, situés presque en face de la forêt, dont la cime des arbres rappelle celui d'un temple païen. Là, se réunissait quotidiennement l'élite de ces jeunes chats qui se sont distingués depuis, soit par leur valeur artistique, soit par leur incapacité, soit par leur attitude dans les jours troubles que nous avons traversés. Mais cette harmonie avait aujourd'hui disparu. Et je ne l'avais jamais connu. J'étais née au temps de la Guerre et des humains devenus fous. J'étais née au temps de mes pires cauchemars, au temps de la bête rugissant dans la nuit. Je suis née au temps de la Mort incarnée, et je ne pouvais rien y faire.
Je me redressai et m'ébrouai pour chasser ces mauvaises pensées de ma tête. Je me passai un coup de langue sur le poitrail, puis sur la patte. Je m'étirai et lâchai un bâillement révélant une rangées de crocs luisants. Ils étaient tout ce que j'avais. Pendant que la plupart de mes camarades détenaient un pouvoir pouvant leur être très utile pour se défendre, je ne détenais qu'une vulgaire paire de crocs et de griffes. J'essayai alors, par tous les moyens, d'en prendre soin. Je clignai des yeux et commençai à faire quelques pas aux alentours. Je savais que je devais rentrer pour retrouver les autres membres de ma Guilde, mais je tenais à avaler quelque chose avant de revenir auprès des miens. L'humus humide et estival s'écrasait sous mes coussinets, m'apportant une sensation de fraîcheur et de liberté inégalée. Je laissai les senteurs florales du Territoire m'émoustiller, tandis que je ne faisais plus vraiment attention où me portaient mes pattes. Après quelques minutes de marche inattentive, j'allai dresser la tête pour tenter d'apercevoir une possible proie à attraper, lorsqu'un craquement me fit frémir les oreilles. Je sortis instinctivement les griffes et je sentis nettement le pelage de mon dos se hérisser. Je n'avais peut-être aucune raison de m'en faire, mais savait-on jamais. Mieux valait prévenir que guérir. C'est ce que ma mère s'amusait à me répéter à longueur de journée lorsque je n'étais pas plus haute que 3 souris.
« Si vous tentez de m'avoir par embuscade, sachez que vous avez encore de nets progrès à faire ! lâchai-je, énervée. »
Contre toute attente, personne ne me sauta dessus, toutes griffes dehors, en poussant un hurlement de guerre. Aucun insecte mutant ne vint m'arracher la carotide. Non, j'étais toujours bien en vie, constituée de toute ma chair et de toute mon sang. Personne n'avait tenté quoi que ce soit pour m'ôter la vie sans la moindre pitié. Je ne savais pas si je devais ou non être rassurée. Un tel silence pouvait peut-être signifier que l'ennemi restait caché dans les broussailles, attendant que je n'abaisse à nouveau ma garde, pour me prendre par surprise et me crever les yeux pour s'en faire un collier avec. Ou peut-être que c'est juste moi qui exagère. Je relevai la tête lorsqu'une silhouette s'avança vers moi, l'air quelque peu hésitant. La femelle sombre possédait des ailes. Des ailes qui auraient pu être magnifiques, si elles n'étaient pas couvertes de plaies qui semblaient être plus ou moins anciennes, et n'étaient pas retenues par des chaînes qui ôtait toute beauté à cet attribue qu'il m'arrivait d'envier. Je lui jetai un regard étonné, sans pour autant relâcher ma vigilance. J'étais cependant plus détendue ; elle n'avait pas l'air d'avoir de pensées meurtrières.
« Je ne tentais pas du tout une ambuscade, loin de là. Je me nomme Plume Noire. Je cherche simplement à rejoindre le camp d'un groupe de chats nommés Caméléons. »
Une future chatte de la Guilde des Caméléons ? Ainsi nous n'étions pas dans le même camp. Nous nous battions pour notre survie, certes, mais nos Guildes ne pouvaient pas parler d'amitié. Je fixai la féline qui se trouvait désormais bien en face de moi, et me rendis alors compte que j'étais bien plus grande qu'elle. Oh, je n'étais pas une géante, loin de là ; pour tout vous dire, j'ai toujours considéré ma taille comme étant normale. Non, c'était cette Plume Noire qui semblait avoir eu un problème de croissance. Ou alors, elle ne l'avait tout simplement par terminé.
« Moi, c'est Talia. »
J'enchaînai presque directement, sans lui laisser le temps de réagir, par une question qui me brûlait les lèvres. Je savais que je devais le lui poser, ou je n'en aurai pas dormi pendant plusieurs semaines.
« Dis-moi, pourquoi ces chaînes ? Pourquoi briser la beauté de tes ailes ? »
Suite à le question que je lui ai posé, la femelle sembla se figer, comme transpercée par une lame qu'elle seule pouvait sentir. Avec de l'imagination, l'on aurait presque pu voir le sang couler d'une plaie invisible au niveau de son cœur. J'eus une pointe de regret devant son air pétrifié, choqué, voir même blessé. Je savais parfaitement que j'avais tapé là où cela faisait mal. Mais je voulais savoir. Il fallait parfois oser demander, au risque de blesser celui ou celle se trouvant en face de nous. Plume Noire avait les yeux comme vidés d'émotions, elle ne réagissait et gardait le silence. C'était comme si ma question était venue briser ses crocs pour s'infiltrer dans sa gueule, et lui arracher la langue sans se demander si cela était bien ou mal. Après un silence qui m'eut semblé interminable, la chatte sombre releva la tête, toujours cette expression mortifiée sur le visage.
« Ces chaînes vois-tu, me permettent d'entraver ces choses, commença-t-elle, une lueur d'horreur sur ses traits. Ce que tu trouve beau, moi je les déteste. Elle me gêne. Je ne peux plus me cacher n'importe où, j'ai perdu une partie de mon équilibre, je ne cours plus aussi vite. Ce ne sont pas des ailes d'ange. Ce sont des ailes maudites. J'ai essayé de m'en débarrasser tout les jours, mais elles sont encore là. Je préfère encore les immobiliser, pour que je puisse les oublier, ne serais-ce que quelques instants... »
Peu à peu, elle avait parlé de plus en plus vite, sans vraiment prendre le temps de reprendre son souffle entre ses phrases. Je n'eus pas besoin de me concentrer pour remarquer qu'elle tremblait, et qu'elle semblait comme assaillie par des souvenirs revenus la hanter sans prévenir. Surement avait-elle eu un passé que je n'avais pas besoin d'entendre ; son air blessé me suffisait pour en deviner assez. Elle arrêta soudainement de trembler, comme pour retrouver toute la dignité qu'elle se devait de garder, et plongea ses yeux dans les miens, avant de continuer par une simple phrase, directe, que je ne pouvais que comprendre.
« Ne crois pas que c'est une bénédiction que de recevoir ces choses. »
Je clignai des paupières et remuai les oreilles. Je ne disais pas que cela était une bénédiction de recevoir ce genre de choses. Cela était la marque indélébile d'un passage dans les laboratoires des Hommes. La blessure éternelle d'expériences monstrueuses qui auraient pu la faire devenir une bête sans cœur ni âme, ou tout simplement l'envoyer aux étoiles. Je soupirai lentement et profondément, et baissai la tête.
« Les oublies-tu vraiment, lorsqu'elles sont enchaînées de la sorte ? La douleur constante ne te rappelle donc jamais ce que tu possèdes de chaque côté de ton corps ? »
Je lui avais posé cette question, non pas dans le but de la blesser d'avantage, mais dans celui de lui ouvrir les yeux. Au fond, j'étais persuadée que c'était vrai. Ces chaînes ne faisaient qu'aggraver la situation.
« Tu sais, on dit que la douleur ne disparaît jamais. Qu'il faut simplement apprendre à vivre avec. C'est la même chose pour tes ailes. Elles ne disparaîtront jamais, tu devras apprendre à vivre avec elles, mais si cela est dur. Je comprends, même si je n'ai pas été victimes de ces atrocités. Camoufler sa douleur derrière un sourire, c'est comme agrandir la plaie béante de notre cœur ; enchaîner tes ailes, c'est comme revivre encore et encore, le cauchemar qui te les a donné... »
La chatte sembla contrariée, voir presque dirai-je, énervée. Je me doutais bien que ce que je lui disais ne lui plaisait pas, et une partie de moi voulait la comprendre, bien qu'une autre avait énormément de mal à accepter sa décision. Pourtant, je ne connaissais Plume Noire que depuis quelques minutes ; en quoi son cas m'intéressait-il ? Depuis quand me penchais-je donc sur les problèmes des autres, alors que je voudrais me convaincre que je n'en avais rien à faire ? Je ne savais pas si c'était de la frustration que je ressentais, à la vue de ses traits mécontents par ce que je venais de dire, ou tout simplement une compassion déguisée. Je n'avais jamais hésité à dire les choses comme elles se devaient, mais là, pour une raison que j'ignorais, c'était différent. Pourtant, je disais simplement ce que je pensais. Et je pensais ce que je lui disais. L’honnêteté, ce n'est pas dire tout ce que l'on pense, mais penser tout ce que l'on dit.
« Je respecte ton point de vue mais sache que bien que tu semble compatir, tu ne sais pas ce que ça fait d'avoir grandi enfermée et d'avoir été transformée. »
Non, je ne le savais pas. Et je restais persuadée qu'il fallait le vivre pour le comprendre ; alors effectivement, bien que je ne savais pas trop que penser du martyr de cette féline, je ne pourrai jamais vraiment la comprendre sous toutes les coutures de sa douleur, pour la simple raison que je n'avais pas vécu ce qu'elle avait enduré, des mois durant.
« Je vais te montrer pourquoi je considère ces ailes comme maudites. »
"Est-ce vraiment nécessaire ?" Je ne tenais pas à ce que Plume Noire, en me montrant tout ce qui lui faisait autant détester ces ailes qu'elle considérait comme maudites, ne s'imagine qu'elle pouvait se confier à moi sans risquer le moindre jugement. Je n'étais pas vraiment connue comme une chatte à qui l'ont venait se plaindre et à déverser ses aveux. Je n'avais pas vraiment appris à écouter les autres d'une oreille attentive, m'étant toujours préoccupée de mes problèmes sans me soucier de ceux des autres ; à mes yeux, les ennuis des autres deviendraient les miens, si j'osais aller y mettre mes pattes. J'étais malgré tout connue comme généreuse, mais pas pour ce genre de choses. Cependant, je n'avais plus vraiment le temps de protester ; la future Caméléon avait déjà commencé ce qu'elle avait à faire. Elle sortie ses griffes immaculées et les planta dans la terre, avant de, lentement, libérer ses ailes sombres des chaînes qui les privaient de tout mouvement. Peu à peu, les maillons scellés métalliques, tombèrent au sol dans un bruit de cliquetis et de fer qui me faisait frémir. Les deux membres de la femelle s'étirèrent ensuite vers le haut, et à ma grande surprise, je vis ses yeux changer de couleur. Le vert émeraude céda sa place à un rouge ardent. Ce brusque changement me confirma mes pensées ; avoir ses gènes modifiés, ça ne laisse pas indemne. On perd toujours une partie de soi. Une partie de son âme. Ça l’assombri. Et ce qui était vert et flamboyant, cède alors la place au plus profond et au plus froid des rouges.
« Quelque chose est en moi, et mes chaînes sont là pour la cadenasser. Ma douleur est infiniment plus grande lorsque je sens mes ailes bouger et changer de positions que lorsqu'elles sont irritées et entravées par mes chaînes. Ces ailes symbolisent mon pouvoir, un pouvoir horrible et malfaisant. »
Des larmes s'échappaient du coin de ses iris, s'écoulant sur ses joues pour s'unir sous son menton, et humidifier le pelage obscur de son poitrail. Une plume se détacha soudainement d'une de ses ailes, tombant au sol. Un léger souffle de vent la fit virevolter dans les airs, jusqu'à venir la déposer à mes pattes, comme un signe sacré des étoiles cherchant vainement à me faire comprendre tout ce qui tourmentait celle qui se tenait en face de moi. Après cette démonstration, Plume Noire attrapa les chaînes mourantes au sol, et emprisonna à nouveau ses ailes, faisant revenir ses yeux à leur couleur initiale. Je restai impassible, sans dire un mot. Que pouvais-je dire après avoir vu cela ? Je ne savais pas si je devais être choquée, effrayée, compatissante, ou que savais-je encore. Ces choses là n'étaient pas faites pour moi. Je ne savais pas réconforter. Je ne faisais toujours que tourner et retourner le couteau dans la plaie. Alors peut-être qu'il fallait que je garde mes lèvres closes. Que je laisse le silence débiter mes paroles à ma parole. Que je laisse le vent porter mes discours perdus jusqu'aux oreilles de ceux qui attendaient une réaction de ma part. Et pourtant, je savais que je ne pouvais pas empêcher les mots de briser leur propre barrière. Il finirait par sortir et exploseraient au grand jour, sans que je ne puisse tenter quoi que ce soit pour les arrêter.
« Je vois. Je comprends mieux à présent. »
Court, bref, direct. Que pouvais-je lui dire d'autre ? Inutile de me lancer dans un nouveau monologue, au risque de finir de la braquer et de la faire fuir. Après tout, pourquoi chercherai-je à l'aider ? Pourquoi chercherai-je à lui dire encore autre chose qui pourrait simplement la blesser d'avantage ? Dites-moi, à quoi cela pourrait-il bien me servir ? Je baissai les yeux et observai longuement la plume qui demeurait toujours à mes pattes, immobiles, comme attendant quelque chose de ma part. Pourtant, je ne lui fis aucune offrande. Je relevai doucement la tête, comme si le moindre geste trop brusque ou rapide de ma part, allait ranimer ce pouvoir qu'elle craignait tant.
« Je suis désolée de ce qui t'arrives. Peu de chats sont reconnaissants du don ou du pouvoir qu'ils ont reçu après de telles expériences, et qui se sont associés en eux, comme une combinaison non-désirée. Et je pense que je peux comprendre cela. »
Je plantai une griffe dans la plume sombre qui effleurait ma patte, et la soulevai doucement du sol avant de la regarder plus intensément. Les particules la constituant dansaient doucement au rythme du souffle du vent, lui donnant un aspect à la fois poétique et abominable. Comme une sorte de magnificence maudite.
« Les combinaisons parfaites sont tellement rares dans ce monde imparfait, lâchai-je avant de me débarrasser définitivement de la plume de ma camarade. Je clignai des yeux, avant de poursuivre. Que comptes-tu faire, après avoir rejoint la Guilde des Caméléons ? Tenter de retrouver une vie normale ? »
Code par xLittleRainbow
Invité
Invité
Mar 28 Juil - 12:31
Dis-moi, pourquoi ces chaînes ?
Invité
Invité
Mar 28 Juil - 14:10
Talia
Feat. Plume Noire
Plume Noire sembla presque soulagée de voir que je décidai finalement de changer de sujet. Après tout, nous n'allions pas continuellement ressasser le passé de cette pauvre Caméléon, et je ne voulais pas lui faire plus de peine que je ne l'avais déjà fait, même si cela n'avait pas été volontaire. La femelle sombre sembla reprendre un sérieux sans faille, et un éclat d'honnêteté à toute épreuve, traversa ses prunelles vertes. Elle semblait sur le point de me dire quelque chose qu'elle pensait vraiment au fond de son cœur, et qu'elle n'avait pas honte de dire.
« Je ne suis pas naïve au point de penser que je pourrais retrouver une vie normale juste en m'éloignant un peu plus de ce qui m'a fait tant de mal.. »
Surement, oui. Elle n'avait pas totalement tord, pour ne pas dire "pas du tout". Il était bien évidemment impossible de retrouver une existence normale après avoir vécu tout ce qu'elle avait vécu. Enfin, il n'était tout simplement pas possible de vivre normalement dans ce monde chaotique, même nous n'avions jamais rien vécu des expériences humaines nous arrachant une partie de notre être. Plume Noire leva quelque peu la tête vers le ciel entravé par des branchages, avant de continuer. Elle semblait déterminée à me dire ce qu'elle pensait, et je savais qu'à présent, rien ne pourrait l'arrêter.
« Je ne pourrais jamais retrouver une vie normale tant que mes ailes et ce pouvoir qui est moi seront encore présents. Pour l'instant je vais arrêter mes vaines tentatives pour me débarrasser de mes ailes et je concentrerais mes recherches s'il existe une méthode pour perdre son pouvoir sans perdre la vie en même temps. Si mon pouvoir disparais, je n'aurais plus de raisons valables pour utiliser ces chaînes. »
J'hochai doucement la tête, pendant que la féline au pelage nocturne, plongeait à nouveau ses prunelles émeraudes, dans les miennes qui étaient dignes des saphirs. Je comprenais ce qu'elle voulait dire, ce qu'elle voulait faire. Un tel choix était tout à fait redevable, et je ne pourrai jamais rien dire pour m'opposer à ce point de vue. Si elle souhaitait faire des recherches pour trouver une solution à ce pouvoir qui avait l'air d'être désormais destiné à lui pourrir la vie, grand bien lui fasse. Je n'étais pas sure que cela serve à grand chose, mais au moins, elle, elle se nourrissait de cette lueur d'espoir qui la garderait surement en vie pendant de longues années.
« C'est bien d'avoir un but dans la vie. Cela permet d'avancer et de trouver une raison pour continuer à respirer. J'espère que tu trouveras une solution à tes ailes et à cette force qui t'habites contre ton gré. »
Je fis une légère pause, pensant à mes paroles. Je ne savais pas si Plume Noire allait me croire, ou si elle allait tout simplement penser que je me fichais délibérément d'elle. J'haussai les épaules et observai les chaînes qui entravaient ses ailes depuis longtemps, avant de regarder à nouveau ses yeux. Je me remémorai leur couleur lorsque cette aura qu'elle tentait de refouler, prenait le dessus sur son esprit.
« Je suis sérieuse, ajoutai-je alors précautionneusement. »