Marchant à pas feutrés à travers la faune agressive, tu prenait garde au moindre mouvement, ton corps régulièrement parcouru de petits spasme de nervosité. Tu regretta très rapidement de t'être aventurée dans ces lieux. Tu croyais qu'une jolie filature, discret entraînement sous le ciel rosé, pourrait te sauver de l'ennui, utiliser ton temps très utilement et de plus t'aider à t'améliorer. Ceci dit, c'était sans compter la dangerosité de ces plantes qui t’avaient à mainte reprises effrayée, -tu devais bien admettre que ses plantes avaient une certaine dimension horrifique sous le ciel à demi-nocturne-. En entrant dans ce lieu muté, tu avais cru qu'il serait simple de les tuer si jamais l'agressivité les corrompais, mais un rat, bien moins futé que ta personne, certes, mais aussi imprudent que tu savais l'être parfois, se fit avalé par une plante, apparemment réveillée par la douce pression de son museau sur ses feuilles. Aussi,en voyant la taille colossale de "l'animal", tu te permit de rappeler à ton corps de se calmer sur les faux mouvements, ce qui eut pour effet de te faire entrer dans un état de stress des plus profonds.

C'était une chance, que tard le soir, la plupart étaient moins actives que le jour. C'était également le meilleur moment pour t'y aventurer. Tu n'étais pas très fatiguée, car tu avais préparé ta journée de manière à ce que tu sois bien éveillée, à cette heure tardive. Tu n'allais pas prendre de risque sur cet endroit, car chaque pas te semblait délicat. Après quelques minutes de dure marche, des crampes saisissant tout ton corps tendu, l'idée de rebrousser chemin te parcouru. Comme un frisson, l'air se refroidit doucement. Tu refusas cependant la douce proposition, car tu ne laisserais jamais une faune te dominer; ce n'était qu'un attroupement de fleurs qui, certes pouvaient te tuer, mais restaient des plantes, et ce n'était pas ça qui avait la capacité de te faire reculer. Au contraire, tu savais que c'était la bonne chose à faire, car l'environnement que tu parcourais régulièrement avait besoin de discrétion, et tu devais t'y entraîner, à cette même discrétion.

Ceci dit, tu t’aperçus également plutôt vite qu'être si tendue ne servait à rien, car la plupart avaient un sommeil lourd, ce qui n'était vraiment pas pour te déplaire. Aussi, au bout de quelques minutes supplémentaires avec des pas moins feutrés -aussi feutrés que lorsqu'on voulait faire une blague à quelqu'un en se jetant par surprise derrière lui- tu trouvas un endroit se formant en une sorte de clairière, et tu décidas que c'était le bon moment pour faire une pause. Oh, tu attendrais que la nuit enveloppe dans son sombre drap la prairie, et tu pourrais ainsi rentrer sans risquer trop de danger. C'était déjà bien assez d'émotions pour toute une journée, ça, tu en convenait bien. Et puis, qui avait l'idée de se balader dans un endroit parcouru de plantes aussi dangereuses qu'un matou adulte en pleine santé? Oh, tu savais que tu exagérait sur le terme, mais tu savais très bien que tu aurais du mal à te défendre si il leur venait l'idée de t'attraper les pattes arrières; ta plus puissante arme, c'est la peau, et tu savais qu'avec ton pouvoir, ça revenait à les taper. Et tu peux bien taper les plantes, surtout de cette taille, ça ne leur ferait rien. Et ce n'était pas tes crocs qui allaient faire la différence, tu en étais à moitié sûre.

Le temps te parut terriblement long, peut-être parce que le stress ne t'avait pas quitté. En alerte, sur tes gardes, tu te concentras tellement sur le mouvement de la faune qu'il te fallut quelques secondes avant de comprendre que ce n'était une plante qui s'approchait de ta personne, mais un chat. Et pas un ami, à ce que tu en sache.

Comme l'air étrange collé au visage de ton interlocuteur l'affichait clairement, ce second personnage ne nageait pas dans la joie à te savoir son ennemie. Oh, tu ne l'était pas non plus; même pas du tout heureuse de croiser de la stupidité par ici. Un Felinae, quoi de mieux pour passer la soirée en bonne compagnie? Avec un petit sourire sarcastique, tu la regarda, la jaugeas sans gêne, de haut en bas. Disons simplement que tu aimais connaître la valeur d'un potentiel adversaire, surtout dans un environnement si hostile. Premièrement -et ça ne te plut guère- tu constatas tout de suite que, malgré la différence d'âge en ta faveur, elle était plus grande que toi. Beaucoup. Tu te savais légèrement en dessous de la moyenne, mais elle, était définitivement au dessus. Et vous étiez toutes les deux plutôt fines. Voyons, elle avait un pouvoir inconnu, mais semblait déjà redoutable pour son âge... Malheureusement, ton objectivité de la situation ne permit pas à ton agressivité de se lâcher pleinement : le combat n'était pas gagné d'avance, et si jamais par mégarde cela devait arriver; tu n'était pas persuadée d'être vainqueur de ce dernier sans peine.

Et puis, en ces lieux, cela influença aussi ta perception des choses. Une demi-paranoïa s'était déjà emparé de ton esprit, te chantant que les plantes étaient vraiment dangereuses, et le stress accumulée ne te permettait qu'une sorte d'état nerveux, sans vraiment conserver ton habituel caractère extrêmement mauvais envers les Felinae. Disons que tu avais eu ta dose de stress, et qu'il était hors de question de déclencher un combat avec des paroles bien peu amicales dès le début. Disons qu'elle avait l'air nettement plus fine qu'elle en avait l'air; alors tu allais simplement agir comme à l'accoutumée, en se forçant d'être également tout à fait plus aimable. Ceci dit, ce n'était pas nettement gagné. Tu devais également te convaincre que le gros du danger était passé, et que, quoi que tu fasse pour cette ennemie-là, ça ne changerait pas. Tu jouais avec le feu souvent, et tes bras étaient déjà parcourus de brûlures; alors ce n'était plus une petite flamme dansant doucereusement à côté de tes paumes qui allait t’effarer.

Te reprenant, tu lui lanças un regard pénétrant, profond et insistant, ne lâchant absolument rien de ton emprise sur elle. Tu saurais immédiatement ce qu'elle vaux; si elle ne détournes pas les yeux, tu sauras son esprit combatif -qui finirait forcément par un combat-, hors, si elle détournait les yeux, tu étais à moitié sûre que l'affrontement n'était pas possible. Ou peut-être que tu réfléchissait simplement trop. Oui, c'était sûrement un des points que tu devais corriger ce soir. Tu pris une respiration profonde. Il fallait te calmer, et enfouir à nouveau cette nervosité qui te guettait à chaque acte. Car tu ne voulais définitivement pas te battre aujourd'hui, ton esprit vagabondant légèrement à des pensées plus lointaines, et n'étant pas près à descendre de son échelle pour s'abaisser à un combat à présent. Détournant les yeux pour les fixer sur le ciel -le temps t'intéressa un instant plus que ton interlocutrice- tu te dis que tu pouvais bien tuer le temps. Toujours en fixant le soleil au loin, tu lui dit d'un ton étrange :

« Une Felinae...? Je ne pensais pas passer la soirée en si bonne compagnie. »

Le ton sarcastique qui allait avec ne se fit pas prier, évidemment. Baissant à nouveau les yeux, tu réalisas que ton ton était légèrement trop bas, alors tu compléta en haussant un petit peu le volume:

« Quel est son nom? »

Tu n'étais pas tout à fait sûre de savoir sur quel patte tu désirais danser, mais tu te dis que tu improviserais plus tard, en tenant compte des réactions de ta nouvelle interlocutrice. Mais tu devais avouer que tu étais aussi à moitié sûre que ta haine pour son groupe ne reprenne le dessus dès qu'elle aura ouvert la bouche.

hrp: J'avoue, je suis pas très fière de celle-là >.<

Elle se tenait bien devant toi, décidée à ne pas se laisser faire par ta personne. Son pelage noir et blanc était légèrement plus hérissé que normalement, tu supposas que c'était un réflexe naturel pour extérioriser sa colère. Bien entendu, qu'elle n'allait pas se laisser faire. C'était pas un de ces Felinae idiots, et pour ça, tu lui devais bien une révérence mentale. Enfin un ennemi de taille, bien que tu n'étais pas sûre d'être en joie à cette idée-là. Ne lâchant pas ses yeux, tu étais bien décidée à lui apprendre qui commandait dans les parages, sentant ton orgueil prendre le dessus sur tes précautions causées par la dangerosité du lieu. Oh, bien sûr, l'inconscience en elle-même pouvait avoir des conséquences drastiquement mauvaises, mais en soi, ce n'était pas une mauvaise chose que tes peurs disparaissent en un éclat par sa présence; c'était sûrement mieux ainsi, et ça avait au moins pour mérite de te galvaniser. Tu étais toujours avec ce masque froid, et préférait le conserver, avec une arrière-pensée que ça la conforterait dans l'idée qu'elle pouvait également se calmer un peu, car tu n'étais pas décidée à la suivre dans sa colère.

« Je m'appelle Patte d'Écume,et je présume que tu es une soldate?»

Elle cracha les derniers mots, comme pour te signifier que oui, au cas ou Captain Obvious aurait délaissé ton esprit, elle était bien en colère comme il le fallait, merci bien. Ta queue se balança doucement, signant que tu n'étais définitivement pas satisfaite de ta situation, et que l'agacement commençait à dangereusement te guettait. Tu ne la supportais déjà plus, et tu avait la dangereuse envie de lui faire comprendre -à l'aide d'une douce tape sur la nuque avec tes pattes durcies par ton pouvoir- qu'elle n'avait nul droit de te considérer ainsi, que tu étais maître et qu'elle n'avait pas à estimer pouvoir se soulever devant toi. Oh, oui, il y avait des sentiments contraires en toi, mais c'était bien simple : tu appréciais son caractère téméraire, mais tu lui reprochait de porter atteinte à ta personne. Personne n'avait le droit de s'estimer supérieur à Pandémie, et personne n'avait le droit de lui cracher dessus. Et si ça continuait, du devrais lui montrer par la force, quoi que tu n'étais pas sûre de l'issu d'un quelconque combat.

Elle se força à détendre les traits de son visage, et te parutt par extension tout de suite plus amicale. L'expression qu'un visage pouvait former était passionnante, et les impressions qu'on exprimait en lisant entre les traits était tout aussi intéressant. Elle sembla un instant considérer qu'elle ne désirait plus échanger un traître mot avec ta personne, et s'éloigna de toi. Après avoir posé une question...? Elle ne connaissait définitivement pas les usages de la société moderne. Ceci dit, tu pouvais en dire autant, alors tu décidas que tu ne lui ferais pas remarquer. Oh, ton agressivité peu passive pour les Felinae, ça, tu l'admettait avec toutes les paroles qu'il te faudrait. Mais c'était tout à fait justifier, alors tu n'allais pas t'en priver ou permettre à qui que ce soit de te le reprocher. Disons que c'est une mauvaise-foi plus ou moins admise. Et ça paraissait tout à fait logique dans ta tête. Tu pensais qu'elle ne te dérangerait plus, que tout était terminé et le combat définitivement écarté. Mais elle n'était tout de même pas décidée à te laisser en paix, et réengagea la discussion :

« Sais-tu si il y a des proies par ici?»

Te rapprochant -car elle s'était trop écartée à ton goût-, tu lui répondis d'un ton courroucé :

« Oui, en effet, je suis une soldate. Je suis heureuse que tu saches utiliser ton cerveau; tes compagnons Felinae seraient fort fiers que tu aie appris à les dépasser mentalement parlant, mais seront néanmoins heureux de constater que la stupidité règne chez toi aussi. »

Sans vraiment lui laisser le temps de réagir, tu réfléchis à sa question. Oh, bien sûr, tu sentais monter en toi la faim, et tu avais aussi besoin de nourriture. Mais l'idée de retourner au milieu de ces plantes terribles, après ce moment doux d'acalmie, ça ne t'enchantait guère. Ceci dit, il y avait quelques odeurs qui semblaient émaner d'animaux encors saufs, et tu étais presque sûre de pouvoir trouver quelques animaux qui auraient élus domiciles ici, aussi étrange cette opinion puisse-t-elle paraître.

« Il semble que nous ne soyons pas les seuls à nous aventurer en ces lieux. Oh, bien sûr, tu peux rechigner à te délecter d'insectes, et par conséquent le choix sera drastiquement réduit; mais je suis à moitié sûre qu'on puisse trouver un rongeur égaré et chanceux. »

Joignant le geste aux paroles, tu t'avanças doucement, la truffe concentrée sur les odeurs environnantes. Il y avait des insectes de taille conséquente, mais tu devais avouer toi-même que c'était peu ragoûtant, et que, tant que tu pouvait l'éviter, tu le ferais. Et aujourd'hui, tu n'étais pas convaincue d'avoir à te nourrir de cela. Tu attendais ceci dit que ton interlocutrice bouge son joli derrière et attrape quelque chose.

Ton honneur fut horriblement blessé par la suite des événements; tu n'eus malheureusement pas assez de temps pour détecter une proie digne de ce nom. Oh, bien sûr, tu n'allais pas abandonner, tu aurais continuer une heure s'il le fallait; de manière à lui montrer ton dévouement pour les tâches qui t'incombaient; et puis, tu avait extrêmement faim. Ce serait idiot de te stopper en si bon chemin, bien qu'il te sembla qu'il fallait te rendre plus près d'une extrémité de la zone, là ou les proies ne s'étaient pas encore faites dévorées par la faune tout particulièrement agressive. Mais bien entendu, c'était sans compter sur les compétences de ton interlocutrice -ou sa chance, bien que tu préférais convenir que c'était uniquement de la chance-. Disons que tu aurais nettement apprécié dévorer une proie bien appétissante sous ses yeux, sans prendre la peine de lui demander quoi que ce soit de ses vœux. Oh, bien entendu, tu ne te serais nullement souciée de l'avis d'une ennemie, et quoi qu'elle aurait pu dire, tu ne l'aurais pas laissé toucher à ton butin. Mais c'était elle qui en avait un, pas toi, et ça, tu te devais de lui accorder.

Elle avait attraper un joli lapin. Un. Lapin. Tu en avais déjà l'eau à la bouche rien que d'y penser. Les lapins étaient déjà rares dans le milieu, que ce soit ici ou ailleurs, et puis ils étaient bien prudents ces derniers temps. Ton dernier repas composé de lapin devait remonter à tellement longtemps que tu ne te souvenais plus de la saveur qu'il procurait; bien que tu était consciente que c'était un met délicieux. Tes oreilles s'abaissèrent légèrement, tant tu étais déçue de ne pas avoir eu tant de chance. Et ton ventre le fit savoir, ce qui ne t'arrangea guère. Tout cela pour rien. Ton ego était blessé, certes, mais ce n'était rien comparé à l'honneur qui avait définitivement pris un sacré coup. Ok, tu étais blessée de n'avoir pas réussie à chasser aussi bien, mais ton honneur te disait que tu étais une véritable larve d'avoir été moins chanceuse qu'une Felinae. Et le comble de tout vint dans sa proposition qui, contrairement à toute attente, ne se fit nullement attendre:

« Et bien,que dis tu de ça? Tu veux partager? Je ne le finirais pas,de toute manière. »

Réellement...? Tu la regardas comme si elle venait de te proposer quelque chose d'extrêmement gênant. Et ça l'était. Une ennemie qui te proposait de la nourriture, c'était quelque chose de très étonnant. Tu ne t'y attendais pas du tout. Partager...? Partager quelque chose avec un Felinae; quelque chose de vital et matériel tel que la nourriture? Tu hésita grandement. Une partie de toi, rationnelle, te disait qu'il n'y avait nul danger -et même l'autre en était persuadée- et que tu pouvais tout à fait accepter l'offre avec enthousiasme. Mais l'autre te disait que c'était juste honteux de s'abaisser à ça. Tu avais un honneur, et tu ne pouvais pas juste le trahir pour de la nourriture. Tu étais comme ça, sûrement que tu étais capable de jeûner pour ne pas toucher à un gramme de ce lapin. Mais un lapin, dieu que c'était rare. Et si ce n'était pas ça, ce serait un insecte. Le plus rabaissant était sûrement de manger des insectes devant une Felinae qui a bien plus sous les pattes, et qui ne le finit même pas, qui plus est. Rougissant violemment, tu étais dans un de ces foutus dilemmes qui prenaient quelques secondes de silence gênant avant de se régler. Voir plus, mais tu n'avais pas plus de temps. Tu nageais dans le retard.

« J'en dis que... Je...»

Tu te mordis la lèvre, toujours hésitante. Vraiment, il n'y avait pas de quoi refuser, au final. Tu pouvais bien abandonner l'honneur quelques instants. Et puis, ce n'était pas comme si elle n'en tirait aucun désavantage : elle aurait une part moins grosse. Enfin, c'était ce que tu imaginais pour te convaincre. Tu savais que tu dirais oui, c'était un peu comme faire semblant de réfléchir en sachant qu'au fond de toi, la réponse sera positive en tout cas. Regardant aux alentours, tu lui dit d'un ton hésitant :

« D'accord... Je te le revaudrais un jour. Ça me frustre extrêmement, mais je ne sais pas si j'aurais la chance de manger quelque chose d'aussi bon avant longtemps; et certainement pas aujourd'hui. »

Et le dernier désavantage : tu le lui revaudrais. Avoir une dette envers un Felinae, ça te fendais le cœur, mais tu n'allais pas rechigner puisque tu avais déjà accepté. Triste pacte que tu avais signé là... Mais si tu avais accepté, c'était aussi parce qu'elle avait un air étrangement accueillant. Du genre que tu pouvais lui faire confiance.