Tu te levas dans l'après-midi, assez tardivement. Le soleil se couchait au loin. Il te semblait avoir passé une éternité, plongé dans une sorte de sommeil impérissable. Les alentours se dessinaient dangereusement, abordant une insécurité presque palpable. L’atmosphère était plutôt légère en cette fin de journée. Il te sembla que rarement l'air eut été aussi agréable. Avec un silence notable, tu demeura quelques instants stable, conservant une expression étrange. C'était calme. Et l'instant d'après, tu te laissais emporter dans cette espèce de sérénité. Refermant tes yeux, tu patientas quelques secondes dans ta prison paisible. Il n'y avait plus rien à dire. Ce que tu aimais la paix, le calme. Quel dommage que tout le monde aime à les briser simplement pour profiter de ta personne. Pas que tu ne pouvais pas les comprendre non plus, mais tout de même, s'ils pouvaient se calmer un peu et te laisser respirer, ce serait avec joie. Délaisser la terre de leur présence pour quelques jours et te laisser une paix d'esprit et de corps, c'était bien trop leur demander, comparé à leur drastique admiration pour toi. D'un autre côté, ce serai d'une affreuse cruauté que de leur en vouloir pour ça. Ces instants de calmes étaient souhaitables, mais tu songeas que seule la mort pouvait t’amener une telle quiétude dans une certaine durée. Alors il valait mieux ne pas espérer qu'elle s'étende d'une plénitude trop avancée.

Alors tu te levas, et patienta quelques secondes les yeux clos, profitant de la paisible ambiance qui trônait en ces lieux. Puis tu observas les alentours. Le soir de la veille, lorsque tu étais venu t'y poser, tu n'avais pas distingué sous quel mastodonte tu t'étais posé. Sa taille, finement découpée, était entourée d'une peau ridée et affreuse, lui donnant un air vieilli et poussé à l'extrême de sa croissance, d'une manière si peu naturelle qu'elle respirait par tous ses pores l'anormalité. Tu ne distinguais pas sa surface, et ne t'abandonna pas à l'idée de l'escalader pour en découvrir toutes les subtilités. Parce que tu avais d'autres choses auxquelles consacrer ta personne, même si ce champignon avait probablement tout aussi envie de se faire escalader par ton auguste personnage. Mais tu ne lui donnerai pas cet honneur, malgré son âge avancé, parce que tu avais autre chose à faire, et qu'il comprendrait probablement de par sa sage âme. C'était ce que tu te disais, pendant que tu prenais une direction relativement aléatoire, mettant toujours un peu plus de distance entre l'énorme champignon et toi-même. Sans vraiment regarder en arrière, sachant pertinemment qu'il y en avait des centaines comme celui-ci, et qu'il n'avait rien d'unique, à l'instar de ses compagnons de race. Alors que toi, tu pouvais te vanter de n'avoir rien en commun avec ton espèce, ce qui te donnait un peu plus de volonté à t'éloigner de cette chose difforme et infâme.

Tu avançais en trottinant, saluant quelques plantes au passage, faisant quelques remarques sur leurs accoutrements, parfois complètement indécents. A haute voix, tu conversais avec les passants, sans te soucier de quoi que ce fut d'autre. La sylve faisait partie de ces endroits presque sacrés, habités par un nombre conséquent d'âmes qui pouvaient apprécier ta personne, et étaient capable de te donner à la fois de l'espace et du calme, avec une admiration silencieuse doublée d'un respect inhumainement haut, et avec une subtilité toujours pleine et complètement inconnue au genre félin, de nos jours. Leur discrétion était tout simplement imparable. Tu te stoppas lorsque tu parvins devant une plante particulièrement jolie, qui se trouvait être une espèce de chose carnivore, mais tellement potite que tu te demandait si elle pouvait réellement te blesser. Tu étais occupé à la complimenter sur son potentiel d'adorabilité, et à lui demander de souhaiter le bonjour à ses parents qui l'avaient merveilleusement éduqué lorsque tu entendis une sorte de bruit, comme une présence qui viendrait peu à peu. Pas que ça t'interrompais en quoi que ce soit, ceci dit.