Je rentrais tout juste d'une patrouille avec d'autres soldats, que je vis la caserne. Après ce qu'il venait de se passer, encore de l'humiliation pure, je reniflai devant le bâtiment avec un certain dégoût qui me venait au coeur de plus en plus depuis que je faisais mon apprentissage de soldat. J'ai l'impression que tout le monde m'en veut. Tout le temps, n'importe où. Ils finissent par me rabaisser. Je ne sais pas ce qu'il leur faut. Je fais pourtant des efforts surhumains pour qu'ils me reconnaissent. Et en même temps, je fais tout pour les éviter. Je ne les porte pas vraiment dans mon coeur, il faut dire. C'est pourquoi à ce moment là, je me suis retournée et suis partie dans la direction opposée. Oui, je suis souvent dehors. Je fais souvent des escapades. Mais je n'ai pas de refuge aussi. Je ne sais pas où est ma place. En attendant, j'explore, je me promène. Dans ces espaces où l'air est suffoquant, et où l'on en retient une impression très sombre malgré qu'il y ait bien trop de lumière dégagée par le soleil, dans cet endroit dévasté. Je me retrouve au bord du ruisseau. Il n'est pas beau à voir, lui non plus... Mais bon, il reste potable, alors je ne vais pas m'en plaindre. Je prend quelques gorgées, pour me désaltérer même si je n'en ai pas tant envie. Il faut quand même que j'ai de l'eau dans mon corps, par cette chaleur. Ca fait du bien, de boire un peu, finalement. Je m'assoit là. Et voilà. Je me sens pris dans une cage : Qu'est-ce que je fais, pourquoi je tourne en rond, où va ma vie. Je me le demande ? Je me le demande toujours. Qui sait combien de temps je vais encore me le demander. Je me le demanderais peut-être toute ma vie, en fait. Est-ce qu'un jour je trouverais un but dans ma lutte aux côté des humains ? Est-ce que je trouverais un but en les soutenant ? Ou est-ce que ce but se trouve autre part ? Je repousse alors un long soupir... Je sens que je vais encore avoir à me perdre longtemps dans ce genre de pensées. Je devrais pourtant me dire que ma place est auprès des Soldats, un point c'est tout. Alors pourquoi je rejette sans cesse l'idée d'être heureux dans cette vie ? La preuve, je n'arrête pas de les éviter, de fuir face à eux. Je ne devrais pas. Je ne devrais pas ! Pourquoi ? Est-ce que je ferais mieux de me rapprocher des humains, voir ce à quoi ils aspirent ? Non, ce que je devrais surtout, c'est prendre sur moi et m'intégrer aux Soldats ! Je recommence à marcher tranquillement, longeant le ruisseau. Ce n'est pas comme si j'avais personne sur qui compter pour m'aider dans ma quête de sens aussi. C'est pour ça que je dois me rapprocher de mon entourage. Ah quel idiot je fais ! Pourquoi ça ne m'est pas passé par la tête plus tôt ? En tout cas... En tout cas, le bruit ruisselant de l'eau qui coule près de moi est rassurant, si rassurant. Je pourrais l'écouter pour des jours entier ! Que je l'aime ! Cela me rappellerait presque... Cela me rappellerait presque quoi ?
Je m'arrête lentement, après avoir senti une odeur aux alentours. Une odeur, qui, si je ne me trompe pas, appartient aux Felinae. Je jette des coups d'oeil tout autour de moi. Au final, j'aperçois un chat perché dans un arbre. Une femelle, calmement posée sur une branche. Elle est blanche rayée de vert, ce qui est plutôt original. Je remue les oreilles. Elle n'a aucunement l'air de vouloir m'attaquer. Pourquoi ne pas essayer de sympathiser ? Mais comment... Elle me regarde. Je la regarde. Je m'assois alors, oreilles tendues, attendant qu'elle prenne la parole la première.

-Coucou je m'appelle Mimosas. Je suis soigneuse chez les Felinae. Et toi ?

Intention repérée avec succès, c'est ce que me répond la féline, plein d'entrain, d'une voix rayonnante. Elle entreprend de descendre de l'arbre, pour me faire face, assise, la queue enroulée autour de ses pattes. Enfin... pour regarder le ruisseau, puis moi. Elle a l'air d'être de nature gentille, et je doute que le contraire puisse être étant donné qu'elle soit soigneuse. J'imagine qu'elle doit montrer un tempérament calme dans sa fonction ? J'imagine. Après tout, je n'en sais pas grand chose, moi. Je ne vis pas dans ce genre de communauté de chats où tout le monde s'entraide. Si un soldat est blessé au combat, ce sont les humains qui le soignent, avec leurs moyens. C'est alors qu'une idée me vient en tête : comment les soigneurs félinae font-ils pour s'en sortir sans les connaissances des humains ? Ils ne doivent certainement pas utiliser de méthode humaine, détestant ces derniers ! Est-ce que l'environnement si faible dans lequel nous vivons leur suffit ? Alors, cette soigneuse commence à attiser ma curiosité. Encore une fois, j'ai envie d'en savoir plus sur les Felinae. Sur elle, aussi. Comment se débrouille-t-elle tout les jours ? J'ai soif de savoir. Même si j'appartiens aux soldats, je veux savoir. Sur ces chats, les Felinae. Ils me paraissent si intrigants, je ne saurais dire pourquoi. Ils sont vraiment très différents. En plus, le peu que j'en ai rencontré hormis le champ de bataille étaient gentils, calmes. On ne peut pas dire de même de certains soldats trop orgueilleux... Enfin ! Il faut que je lui réponde ! Je l'ai assez fait attendre comme ça, je crois, à cette Mimosas ! Joli nom, d'ailleurs. Cela me ferait presque penser au nom d'une fleur... Une jolie fleur rondelette. Pourquoi pas ? Peut-être que ça aurait pu exister, si le monde n'était pas si infecté.

- Bonjour ! Mon nom est Uliah, et je suis un soldat. Mais ça, je crois que ça se sent assez sur mon pelage. N'est-ce pas ?

J'ai fait exprès de prendre un air amusé, histoire de paraître sympathique à mon tour. Et d'engager une conversation ! Oui, j'ai pleins de choses auxquelles j'aimerais bien parler avec elle !

- Mais je suis un jeune ignorant, alors je ne cherche pas trop de mouises. Comme ça, tu es soigneuse? Tu arrive à soigner des blessures simplement avec des plantes ?

Mimosas semble s'étonner de ma question, comme si cela lui paraissait étrange. Est-ce que j'ai dit quelque chose d'étrange ?

- Oui ,je suis bien soigneuse. Je soigne avec les plantes qu'on trouve dans la nature.Par exemple la royale pour les infections et pleins d'autre plante. Mais on ne te soigne pas avec des plantes ?

Ah ! Ca ? Au final on est tout aussi ignorants l'un que l'autre ! Mais ne connait-elle pas les humains et leurs méthodes ? Si elle est devenue soigneuse, ne s'est-elle pas appuyée sur les humains ? Cela me paraît perturbant ! Est-ce que les Felinae ont inventé leurs propres méthodes de guérison avec seulement les moyens du bord ? Je sais bien qu'ils n'aiment pas les humains, mais là, ça m'épate. Qu'ils aient fait cela tout seul ! C'est fou ! Donc chaque plante aurait un effet différent ? Comment ont-ils fait pour tous les décourir ? Ah, je suis bête. La seule idée qui me vient, c'est qu'ils les ont toutes testées ! Mais ce devait être dangereux alors. Je n'aimerais pas être un Felinae aux débuts de la guilde...! Bon, reviens à l'instant présent, Uliah. Donc... Donc, cela lui paraît même tout à fait normal de soigner avec des plantes ! C'est vraiment très étrange. Est-ce que les plantes peuvent être utilisées à tout les escient ? Il doit bien y avoir une limite, non ?

- Oh ! C'est différent pour nous. Les humains ne se servent pas des plantes, mais de produits de leurs invention, liquides ou sous forme de petite croquette. Ca peut paraître étrange dis comme ça, je l'admets ... Mais on a l'habitude ! Et vous ne manquez jamais de plante, avec toute cette pollution ? Il n'y a jamais de nouvelle maladie qui vous surprend ?

Je me rends alors compte que la vie en terre hostile doit être bien plus compliquée que la notre, à nous soldats. Les Felinae ont du faire beaucoup d'efforts - et doivent encore en faire quotidiennement - pour survivre. Ce n'est pas comme si les maladies voire épidémies étaient courantes dans un tel environnement ! Donc, biensûr qu'il y a de nouvelles maladies qui les surprend. Qu'est-ce que je peux être idiot parfois. Je parle sans réfléchir ! Est-ce que Mimosas va croire que je prend pour une idiote ? Que je la provoque ? Non ! Je veux juste sympathiser avec elle et pouvoir lui parler des soldats quand elle me parle des Felinae. Aïe ! J'espère qu'elle ne va pas se renfrogner. Je m'inquiète pour peu, mais on sait jamais...

Cette conversation devient vraiment intéressante ! J'ai envie d'en apprendre toujours plus sur la médecine des chats de l'extérieur. Depuis tout à l'heure, nous sommes là, à discuter, toujours dans la même position, mais ça ne me dérange pas. J'apprécie ce moment. Mimosas doit se poser tout autant de questions que moi, puisque nous avons tout les deux un léger un moment de réflexion avant de répondre à chaque question. Elle répond enfin :

-Des fois , on manque de plantes mais on arrive à se débrouiller .Ça arrive que ,il y est de nouvelles maladies mais c'est rare.Est-ce que les croquettes soigne toute les maladies.Est-ce que elles ont un gout ?

Ah, au moins, elle n'a pas l'air de se sentir offusquée par ma question. Donc ils arrivent à tout soigner avec si peu d'ingrédients... Woa. Aussi, je pensais que les épidémies se répandaient couramment dans le coin. Mais j'imagine qu'ils doivent bien faire attention, lorsqu'ils chassent. Car j'imagine qu'ils chassent, puisque personne ne viendra leur donner à manger. Je me souviens alors soudainement qu'elle ma posé une question à son tour. Ah oui, je crois que l'histoire des croquettes l'a intriguée. Je voulais parler de médicaments, mais je ne savais pas si elle connaissait le terme, alors j'ai dit croquette dans l'espoir qu'elle comprenne de quoi je parle... Mais ça n'a pas l'air d'avoir marché.

- Oui, il y en a de différentes sortes. Même si elles se ressemblent toutes - elles sont toutes blanches -, les humains les gardent dans des boîtes différentes et savent toujours de quoi il s'agit. Ils ne se sont jamais trompés sur le médicament à administrer, à ma connaissance. Mais c'est un peu répugnant à manger. La plupart n'ont pas de goût, et sont soit farineux soit pâteux.

Tout en prononçant cette dernière phrase, je fais une grimace de dégoût, car y penser me fait déjà horreur. Mais je me met ensuite à glousser, comme pour détendre l'atmosphère, naturellement. J'attends alors impatiemment ce qu'en pense Mimosas, même si cette attente ne doit durer que quelques pauvres secondes.