Ces monts, ces hauts sommets de pierres, je les connaissais désormais par coeur. Depuis leur découverte, il y a de cela quelques temps, je m'y étais souvent rendu pour admirer la vue que l'on avait d'en haut. Elle n'était certes pas la plus belle, mais il m'arrivait souvent que je me couche sur une roche, les yeux mis-clos, essayant d'imaginer ce à quoi le monde ressemblerait avec de la verdure. Le paysage serait tellement beau avec une touche de vert ! Une touche de bleu, peut-être, si un lac s'était formé ? Le tout prenant des reflets or et vermeil avec la venue de l'automne. Ah, que le monde devait être plein de beauté, jadis.

Un soupir franchit la barrière de mes lèvres, pendant que je continuais mon ascension. Tout était calme en ce moment. Pas de maladies, d'épidémies, de graves blessures à recenser, ce qui était reposant. Les soigneurs pouvaient se permettre de s'absenter un petit laps de temps, la conscience tranquille. C'était d'ailleurs ce qui m'avait amené ici. J'en étais presque venu à m'ennuyer, au camp ! Les réserves étaient pour l'instant pleines, je n'avais donc pas à crapahuter un peu partout pour ramener telles plantes, telles baies, telles racines où je ne savais quelle autre végétal.

Je décidai d'accélérer le pas. Bien que les températures étaient en ce moment bien trop chaudes pour moi, ce qui me contraignais à être resté à l'ombre ces derniers temps, j'avais décidé de sortir. Mais la brise qui soufflait en haut des Monts m'avais donné le courage de bouger et d'y retourner. Cette brise, étonnamment fraîche, soulevait mes poils en rafales régulières, emmenant mes pensées voler au gré des vents. Ma tête était a la fois totalement vite et remplies de questions auxquelles je ne trouvais pas de réponses. Je devais d'ailleurs avouer que cette balade improvisée avait également pour but de me vider l'esprit et de le débarrasser définitivement de ces pensées intrusives qui m'avaient longtemps gardé éveillé la nuit. De longues nuits, pendant lesquelles seules les étoiles m'avaient prodigué un réconfort.  

Chassant ces flots de réflexions qui m'avaient distraient, je pris un instant pour regarder autour de moi. J'étais arrivé dans une petite crevasse taillée à même la roche, m'offrant un joli point de vue que je n'avais pas encore découvert. Heureux de cette trouvaille, mes oreilles se dressèrent, et je me dépêchai d'arriver vers une sorte de promontoire de roche sur lequel je me couchai tel un roi sur son trône. Mais ce n'était qu'une fois bien installé que j'aperçus non loin une silhouette féline au pelage brun aux tâches plus foncées, ainsi que de grandes ailes dont les plumes se teintaient de blanc à leur extrémité. Intrigué, je me remis debout sur mon perchoir, et interpella l'inconnu.

-Hey ! Qui es-tu ?                            

L'inconnue que je venais d'apostropher se retourna vers moi. Malgré la distance, je pu distinguer ses grands yeux bleus. Elle trottina jusqu'à moi, marchant d'une démarche légère, pendant que je l'observais sans bouger de mon rocher. Cette femelle, puisqu'à l'évidence il s'agissait d'une femelle, parla d'un ton enjoué et avait l'air fort sympathique. Cependant, je décelais une odeur qui ravivait en moi une certaine méfiance : celle des Soldats.

Cela faisait longtemps que ma méfiance ne s'était pas réveillée face à l'odeur des représentants de ce groupe sanguinaire. Je m'en voulais toujours de penser ainsi, mais je devais avouer que je n'étais pas du genre à faire ami ami avec eux. Evidemment, avec mon statut, si l'un d'entre eux était dans le besoin, je l'aiderai sans hésiter, mais ce n'était pas pour autant que j'allais sympathiser.

-Salut ! Je m'appelle Shimizu, soldate de première ligne.

J'en étais sûr. A ces paroles, je haussai légèrement un sourcil. Une première ligne donc ? Je me fis la réflexion qu'elle n'avait pas tellement le gabarie d'une grande combattante, mais après tout, qui étais-je pour juger avec ma taille et ma corpulence de guêpe ?

-Puis-je savoir qui est le chat qui se trouve devant moi ? dit-elle après avoir grimpé à son tour sur un rocher alentours.

Même si la question n'était en rien agressive, et que la femelle au pelage tacheté me parlait de façon amicale,  je me permis de prendre mon temps pour répondre. Une envie de mentir m'était passée par la tête. Je n'étais peut-être pas le plus doué dans ce domaine, mais je savais me faire convainquant quand je le souhaitais vraiment. Après tout, elle ne savais peut-être pas que j'appartenais aux Felinaes... ? Si un soldat l'avait su, m'aurait-il abordé de cette façon ? J'hésitais. Cela pouvait être amusant après tout... Même si je risquais tout de même gros. Imaginons qu'elle n'est pas seule. Si ses copains me tombaient dessus, en apprenant que je lui avais menti sur mon identité, cela pourrait mal se goupiller. Et puis, de toute façon, passer pour un soldat ? Avec le peu de muscle que j'avais ? C'était un mensonge qui ne tiendrait jamais la route, même devant un Bleu...

-Je m'appelle Raphaël. Je suis un solitaire. répondis-je d'un ton calme, me léchant une patte pour la passer derrière mon oreille.

Finalement, j'avais choisi l'option de mentir, mais... Remastérisée. Peut-être que me faire passer pour un Solitaire serait plus crédible ? A moins qu'elle ne détecte mon odeur. Mais tant pis, je misais sur ça, après tout, un petit mensonge de temps en temps ne pouvait pas faire de mal, hein ?

-Si je peux me permettre, qu'est-ce qu'une première ligne vient faire dans le coin ?

Je tentais une approche, d'un ton courtois. Selon sa réponse, j'arriverai peut-être à savoir si elle était seule ou si d'autres soldats pouvaient débarquer d'un instant à l'autre. Et ce, si je pariais sur le fait qu'elle me disait la vérité. Elle pouvait très bien choisir de mentir. Et je n'allais rien pouvoir contester de toute manière.  

Comme pour ne pas montrer que j'avais des arrières-pensées qui trottait en ce moment dans ma tête, je secouai celle-ci pendant que ma queue se balançait doucement derrière moi. Prends une pose naturelle Raphaël. Tu trouves toujours un moyen de t'en sortir après tout ! J'attendis ma réponse en plantant mes yeux verts dans ceux de Shimizu.

Up ♪

Deuxième Up ♪