Apeurée, j'observai les gigantesques champignons se tordre face au vent violent. Effectivement, depuis plusieurs jours désormais, une tempête avait éclaté sur toute la Zone en Mutation. Certains disent qu'elle fait rage bien au delà et que toutes les terres sont sous l'emprise colérique des rafales. Heureusement, les géants mutants protégeaient la sylve, malgré que la peur qu'ils s'effondrent un jour me collait à la peau et au pelage. D'ailleurs, je n'étais pas la seule, bien d'autres chats étaient eux aussi bien effrayés.
Cachée sous les troncs entremêlés des champignons aux mille couleurs, je sentais la bise qui ébouriffait mon pelage immaculé, faisant danser mes petites flammes. Mais elles ne dansaient pas gracieusement comme à leur habitude. Non. Elles bougeaient plutôt avec une telle violence que l'on pourrait croire qu'elles s'éteindrons, pour ne plus jamais s'embraser. Je ne pense pas que cela puisse arriver, mais si c'était le cas, je ne m'en remettrait pas. Il faut dire que je les affectionne beaucoup.
Mon ventre gargouilla. Evidemment, à cause de la tempête, aucun chasseur n'a pu partir chercher de quoi quoi manger. Et j'en faisais partit. Nous ne savions pas combien de temps allait durer les déchaînements, mais on priait pour que la réserve de gibier tienne jusqu'au bout. De plus, j'avais remarqué que, de jour en jour, mon ventre se gonflait. Là était une autre de mes craintes. Je savais très bien ce que cela signifiait et j'en avais peur. Très peur. Qu'allait dire la guilde en découvrant que j'attendais des petits ?! Et pourtant je me devais d'assumer mes bêtises... Serais-je au moins une bonne mère ? Et si le clan refusait de garder les bébés ? Qu'en ferait-ils ?... Des milliers de questions tourmentaient mon esprit ne faisant qu'accentuer mes angoisses.
Soudainement, un bruit assourdissant me sortit brusquement de mes pensées. J'émis un gémissement terrifié et me levai d'un seul coup, affolée. Je me retournai brutalement et écarquillai les yeux en apercevant avec effroi des énormes morceaux de champignon s'effondrer. Je me mis alors à reculer jusqu'à m'enfuir en courant, épouvantée. Je ne regardais même plus où j'allais, toutes mes craintes mélangées les unes aux autres me rendaient complètement dingue. Mes pattes se fatiguaient bien vite à cause de mon gros ventre et pourtant je courais toujours, miaulant avec folie. Jusqu'à ce que je me cogne contre quelque chose. Abasourdie, j'ouvris grand les yeux et inspirai un bon coup. Essoufflée, je crachai contre la chose qui avait barré mon chemin. Mais je rangeai bien vite ma colère lorsque j'aperçus devant moi le chef de la guilde : Dariel. Morte de honte pour avoir non seulement bousculé l'imposant mâle mais aussi lui avoir craché dessus, je me remis debout en vitesse. Je remarquai qu'il était bien plus grand que moi, et sa robuste carrure m'intimidait. Je déglutis et articulai :
"Oh, Dariel !..."
Mon pelage s'ébouriffa de honte.
"P-pardon... Je ne voulais pas... Excuse moi..."
Je baissai la tête, toujours aussi humiliée. Mais qu'elle mouche m'avais piqué ?! Je m'assied en vitesse, ne voulant en aucun cas que le grand mâle tigré s’aperçoive de ma grossesse. J'espérais de tout cœur qu'il ne la voit pas... Je sentais le regard de Dariel se poser sur moi. Comment allait-il réagir ? J'avais tellement honte...