La femelle au pelage crème était partie de bonne heure. Elle avait du mal à trouver le sommeil, peu importait l’heure, et il fallait bien qu’elle trouve de quoi s’occuper. Même si elle n’était apprentie que depuis peu de temps, elle était partie à la recherche de plantes médicinales, principalement pour apprendre à les reconnaître à l’odeur. C’était bien son seul moyen pour les repérer, étant donné qu’elle ne percevait que l’invisible,et utiliser son pouvoir pour voir ces odeurs ne pouvait pas être la seule solution. Son museau collé contre le sol à la manière d’un canidé, elle tentait de trouver une quelconque herbe qu’elle sera capable de reconnaître.

  Elle leva subitement la tête. Malgré l’humidité ambiante en ce début de journée, elle reconnaîtrait entre milles le parfum de cette plante violacée. De la lavande. C’était une plante très présente dans les plaines où elle vivait autrefois, et cette odeur, malgré les mauvais souvenirs auxquels elle était assignée,  s’était gravée dans son esprit. La plante ne se trouvait pas très loin, quelques mètre tout au plus, mais cela pouvait devenir un véritable parcours du combattant pour Elidea. Elle émit un petit claquement de langue. Cela fonctionnait avec elle comme une sorte d’ultrason, qui lui permettait de repérer les obstacles. Elle les discernait grâce à sa Vue, mais il fallait par la suite qu’elle s’en rappelle, car elle ne pouvait le faire plus d’une fois. Un énorme chêne à gauche, et une branche épaisse un peu plus loin.

  Prenant ses précautions, elle avança lentement, sentant l’herbe mouillée sous ses coussinets bleutés. Ses vibrisses effleurèrent le tronc de l’arbre, et la chatte fit un pas sur le côté. Bientôt elle tomberait sur la branche. Sa patte avant droite la toucha. Elle bondit donc par-dessus avec agilité, arrivant à côté de la lavande.  Tournant la tête, l’odeur provenait de la droite, au pied d’un rocher. Elle s’avança, renifla de nouveau le sol pour s’assurer qu’il s’agissait bien de cette herbe médicinale, puis l’arracha tendrement, ses crocs s’enfonçant dans la tige épaisse.

  Alors, elle releva la tête d’un geste vif. Une odeur animale. Plus précisément féline. Le reste était caché par l’odeur enivrante de cette fleur violacée. Elle la déposa sur le sol afin de trouver plus d’informations sur ce chat. Il était jeune, et une odeur de dominance ressortait.  Elle s’avança un peu vers ce félidé, et se posta devant lui, l’œil peint sur son bandeau pointé dans ceux du chaton.

Et ben dis donc, voilà un chaton bien peu farouche. Sa petite voix enfantine aurait presque fait rire Elidea. Comment voulait-il aller chasser? Bien qu'Elidea ne connaisse pas grand chose dans l'art de la traque, elle doutait fortement qu'un matou bien plus jeune qu'elle puisse attraper quoi que ce soit. Elle ressentait un peu d'inquiétude dans l'esprit du chaton, avant qu'il reprenne son courage et commence à parler

« Tu permet ?! J'vais chasser. Laisse moi passer immédiatement ma belle. »

Croyait-il sérieusement que l'apprentie aller le laisser passer comme ça, sans problème, sans rechigner? Ca se voyait qu'il ne la connaissait pas. Un petit félin comme lui ne ferait pas loin feu plus loin dans la zone, il se ferait dévorer par la première bestiole qui passerai. Même si il semblait la prendre de haut, cela n'empêcha pas la femelle de lui bloquer la route, restant bien devant lui. Une nouvelle odeur émergea plus loin dans les buissons. Mais ce  n'est pas possible! Combien de gens sont éveillés à une heure pareille? D'autant plus qu'il s'agissait d'un deuxième petit. Le fugitif s'adressa au second arrivant d'une voix hautaine. Il ne fallait pas l'énerver celui-là.

Mais ce n'était pas une raison. Elidea n'était pas du genre à se laisser faire,
encore moins par un petit félin encore plus jeune qu'elle! Peut-être était-elle aveugle,
mais si il croyait que cela l'empêcherait de le ramener dans son abri, il pouvait toujours courir! Il semblait également rassuré par le fait que ce soit une femelle, mais il faudrait bientôt qu'il apprenne que les félines se battent aussi bien que les félins, et ne sont pas dans ce monde juste pour garder les petits fuyards comme lui.

Tandis que ses oreilles grisâtres se tournaient vers le chaton nouvellement arrivé, son regard ne quitta pas le premier. Restant bien droite sur ses pattes, elle s'adressa au fugitif

« Aller chasser vois-tu ça? Et que vas-tu chasser petit moustique? Ne crois pas que je vais laisser une cervelle de moineau comme toi quitter le QG à une heure pareille »