Je secoue les oreilles, agacée par la pluie qui malmène mon pelage déjà assez trempé comme ça et par le vent violent qui passe brusquement dans mes moustaches, m’envoyant encore et toujours des gouttes glacées dans les yeux.
Mais qu’est ce qui m’a prit de venir au ruisseau alors que je sentais bien dans l’air qu’il allait pleuvoir aujourd’hui ? Juste pour me promener et être tranquille un moment ? Franchement, je suis pathétique parfois ! J’aurais été bien mieux au camp ! Au moins là-bas je ne serais pas trempée et je ne risquerais pas à chaque pas de tomber dans la boue !
Je pousse un feulement énervé et court me mettre à l’abri sous un buisson qui m’a tout l’aire d’être un endroit parfait pour attendre que le déluge cesse. Mais à peine mon corps glissé dans une profonde brèche menant vers une espèce de petite grotte, je sens comme une odeur qui n’a rien à faire ici. Sous les effluves humides de boue et de renfermé régnant ici, il y a comme un relent de fourrure de chat trempé qui sèche doucement. Balayant vivement l’espace restreint de mes yeux claires, je remarque vite une boule de poiles massive couchée sur le sol au fond de la tanière.
Je déglutis lentement, imaginant le pire. Ne me dite pas que s’est un soldat venu, lui aussi, se réfugier ici ?... La pluie brouille toutes les odeurs et il m’est impossible de savoir à quelle guilde appartiens le félin. Oh merde, mais dans quel pétrin me suis-je donc encore fourré ? J’ai vraiment le don pour m’attirer des ennuis ! Nerveuse, je commence à faire demi-tour sans quitter la boule de fourrure noire du regard. Mais pouvoir m’échapper comme ça aurait été trop beau pour être vrai.
Le chat relève soudain la tête, et braque ses yeux voilés sur moi. Il est aveugle. Mais je reste scotché par la force de ce regard dans lequel semble danser comme une flamme de haine pure.
Je sens la peur me tordre les entrailles, mais son odeur monte doucement à moi, et je soupire de soulagement tout en souriant nerveusement.
C’est une Felinae. Une camarade dans ce monde de douleur ! Crotte de souris, qu’est ce que j’ai eut peur ! Mon sourire s’accentue un peu plus et je m’assois doucement. J’espère que ce n’est pas quelqu’un de désagréable, et qu’elle ne va pas me chasser. Un peu de discussion ne pourra que me faire du bien. Et puis de toute façon je ne retournerai pour rien au monde sous la pluie, ce terrier ne lui appartient pas ! Si ?
Avec un air de défi mais néanmoins avec une voix sincèrement enjouée, je miaule :
« Enchantée, camarade ! J’espère que je ne te dérange pas, mais la pluie ma prise par surprise et ma poussé à me réfugier ici. Je m’appelle Hiyuri, et toi, tu es ? »
Ma curiosité s’aiguise et j’essaye de l’observer discrètement. C’est une femelle, assez jeune, à l’épais pelage noir et orange vif. Elle a deux ailes, tout comme moi, assorties à son pelage. Mais son regard reste bien la chose la plus fascinante chez elle. Rien que plonger mes yeux dans les siens me donne des frissons désagréables. Ils devaient pourtant être beaux, avant, mais me font pour l’instant plus peur qu’autre chose, à cause de cette flamme… Ce feu brûlant dans ses prunelles comme une colère jamais tarie et dévorée par une soif de vengeance impressionnante…