Feat. Ice Blue

« L'hiver n'est qu'une création de nos esprits pour laisser s'échapper le froid de nos cœurs. »

Code par xLittleRainbow

Prends garde au coeur de glace...

Featuring Mhei

     Cette nuit-là, le ciel était clair et dégagé. Il faisait froid, il faisait bon. Les arbres murmuraient. J'avais quitté le camp, trop agitée pour dormir. Le vent parle, cette nuit. Il a des choses à me raconter ? J'arrive.
     La nuit est pour moi en tous points différente du jour ; le monde sensible est bien plus ouvert la nuit. La moindre brindille parle. Les étoiles ne sont visibles que dans les ténèbres. A des milliards de mondes de nous, elles nous parlent, elles aussi. J'ai besoin de me dégourdir les pattes. Sans savoir par quel hasard, je me retrouve à l'étang. Cet endroit est fort peu appréciable le jour ; pas un seul groupement d'arbres, l'espace est dégagé - trop dégagé - et renforce l'insécurité. Mais la nuit, c'est un autre monde. L'endroit est bien plus rassurant. Je remarque seulement que l'eau croupie est gelée, renforçant l'effet apaisant que l'endroit a sur moi. Pourtant, je sens que quelque chose vient troubler la tranquillité nocturne. Une présence. Je ne vois aucun chat dans les environs, et pourtant la présence est forte. N'y-a-t-il donc aucun endroit sans personne ?
     J'aurai aussi pu faire demi-tour. Mais cette conscience était des plus intrigantes. Troublante. Je plaque les oreilles en arrière. Je discerne, dans obscurité de la nuit, une aura des plus étranges. Ses couleurs sont extrêmement nuancés, tout autant que sa vivacité varie d'une seconde à l'autre. Je frissonne. Dans quoi vais-je encore me mettre ? J'avance, déterminée. Une lumière bleuâtre contraste avec la polychromie de l'aura du félin couché au loin. Qu'est-ce que c'est ? Je m'approche lentement, et observe bientôt un chat au pelage clair. la lumière bleutée semble venir de son épaule. Par pressentiment, je reste à bonne distance de mon comparse, méfiante. Je ne peux même pas sentir son odeur, elle est camouflée par les senteurs de l'étang et du froid et je suis trop éloignée. C'est alors que, d'une voix rauque semblant venir d'outre-tombe, le félin me lance :

- Est-ce que tu existes ?

     Je plaque mes oreilles en arrière, à nouveau. D'étranges émotions m'assaillent. Ça ne va pas. Son aura semble mourante. Comment cette femelle (puisque finalement, c'est une chatte) a-t-elle pu se mettre dans un état pareil ? Je soupirai imperceptiblement. C'est tellement insensé de choisir la souffrance.

- Cela dépend du référentiel.

     Puis je m'assois, toujours à distance raisonnable d'elle. Pas question de me faire aspirer par ce trou noir. Je cherche en moi ma petite lumière bleue glace et je l'imagine m'envelopper d'une douceur protectrice. Cette chatte claire ne semble pas irrécupérable, juste perdue. Certainement qu'elle a perdu un peu de sa lumière en chemin. Si elle le désire, elle peut la retrouver. Alors sa nuit ne durera pas éternellement.

Code par xLittleRainbow

Feat. Ice Blue

« L'hiver n'est qu'une création de nos esprits pour laisser s'échapper le froid de nos cœurs. »

Code par xLittleRainbow

Prends garde au coeur de glace...

Featuring Mhei

     Aucune réaction. C'est la première chose qui me vient à l'esprit. Rien. Le vide. Je sens mes épaules se crisper. Je n'ai jamais eu une âme de sauveuse. Cela m'est bien égal de voir les autres subir les conséquences de leurs choix. Après tout, ils ont choisi. Ils ont choisi de ne pas s'en sortir, de souffrir. Et qu'importe ? Ils sont seuls responsables. Pourtant, en moi, peut-être est-ce dû à tous ceux que j'ai rencontré, ceux qui m'ont indirectement changée, mais quelque part dans mon esprit, une part de moi se braque. Révoltée ? Indignée ? Agacée ? Soucieuse ? Voilà que je me sens concernée par le sort des autres, maintenant. Je ne me connaissais pas ce soudain côté altruiste. Et pourtant. Mes pattes refusent de faire demi-tour. Et bien ! Voyons ce que cette chatte a de si terrible à nous montrer. Son pouvoir est-il si destructeur pour la chambouler à ce point ? Je veux en avoir le cœur net.
     Soudain, la chatte claire se relève, mi-chancelante. Elle n'a seulement l'air que d'être l'ombre d'elle même. Triste. C'est la pensée qui surgit. Puis, d'une voix toujours lointaine et décalée, la femelle miaule :

- Je ne comprends pas comment cela marche. Comment cela arrive. Comment tant de temps tue. Pourquoi moi. Pourquoi lui. Tu peux me dire Passie ?

     As-tu besoin de comprendre pour être satisfaite ? Tu penses que quelqu'un puisse y comprendre quelque chose, dans ce monde étrange ? Quelle idée présomptueuse. Je secoue la tête. Décidément, elle ne cherche même pas le soleil. Idiote. Ce n'est même pas comme si tu assumais derrière. Je me trompe ? Alors je décide d'aller voir.
     Je me relève, avance d'un pas, puis deux. Seule l'aura de cette féline m'indique qu'elle n'est encore pas un fantôme ou une âme errante. Je m'approche encore, lorsque son aura disparaît. Je me fige sur place. Où est-elle passée ? Où sont-elles toutes passées ? Je cligne des yeux, croyant être victime d'une quelconque hallucination. J'agite le bout de ma queue, et me rend compte que celle-ci est étrangement courte. Non pas courte, normale. Je suis normale ? Il me faut un certain pour comprendre l'étrange charme qui agit sur moi. Mon pouvoir ! Mes modifications ont disparu ! Je regarde la chatte, toujours dans un état second, et comprend. C'est cela, ton pouvoir ? Tu endors nos modifications génétiques ? Je réfléchis un instant. En quoi est-ce si terrible ? J'avance jusqu'à n'être plus qu'à un demi-mètre de ma comparse. Je me plante devant elle, déterminée. Je ne vois peut-être plus les couleurs dansantes de son âme, mais je ressens toujours tout. L'empathie n'est pas un "pouvoir", c'est seulement la résultante d'une sensibilité accrue. Sans ménagement, je pose une patte contre son flanc, libre à elle de se dégager. Je me retiens de pénétrer aisément ses émotions, je ne veux pas savoir, pas comme ça. Je lui lance alors :

- Eh, toi. Tu crois franchement que quelqu'un sait ?

     Non mais regardez-moi. Tout me surprendra toujours, y compris moi.

Code par xLittleRainbow

Feat. Ice Blue

« L'hiver n'est qu'une création de nos esprits pour laisser s'échapper le froid de nos cœurs. »

Code par xLittleRainbow

Prends garde au coeur de glace...

Featuring Mhei

     Fuir. Douleur. Fuir. Mes côtes. Elles font mal. Je retire ma patte vivement. Mauvaise donne. Mauvaise idée. Des pensées précipitées et alarmées se bousculent dans ma tête, des pensées qui ne m'appartiennent pas. Je les chasse tant bien que mal. Compte-t-elle se laisser aller ainsi encore longtemps ? Idiote. Cette pensée simple qui se boucle dans mon esprit. Je soupire intérieurement. Tout est calme, la nuit est tranquille, pourtant, en elle, tout est tellement bruyant. Pourquoi ne fait-elle pas taire toutes ces agitations sonores inutiles ? N'a-t-elle pas trouvé mieux comme solution pour mourir à petit feu ? Idiote. C'est peut-être bien la première fois que je me sens aussi désolée pour quelqu'un. D'où pense-t-elle que ses souffrances soient si grandes qu'elle se permette ainsi de se laisser couler sans même essayer de nager ? Trop de bruits. Trop de chaos engendré seulement sur des illusions dont elle est maître. Même lorsqu'elle me dévisage d'un air à la fois absent et affolé, je ne réagis pas. Elle crie. Elle ne fait que hurler, sans arrêt. Mais qu'attend t-elle donc ? D'un coup, elle s'échappe, fonce droit sur un rocher et s'écrase dessus, tête la première. Je reste un moment, stupéfaite, ressentant une vive douleur dans le crâne lorsqu'elle recommence. Encore et encore, elle se tape. Je grince les dents, à demie-révoltée, à la fois par la souffrance qu'elle s'inflige, mais aussi qu'elle s'inflige.

- Passie... Sors... Passie... Sors.... Passie... SORS ! SORS ! SORS ! SORS !

     Tais-toi.. Tais-toi... Tais-toi ! Elle s'arrête, semble réfléchir. Mais bon sang, où croit-elle chercher et trouver de l'aide ? Idiote. Insensée. Si tu cherches à mourir, cherche quelque chose de plus efficace. Je réprime un grondement. Elle fait mal. Sa présence est instable. Parfois absente, parfois déferlante. Elle se met alors à hurler, sans que cela ne m'étonne, mais cette fois-ci à haute voix :

- L'eau n'est pas la solution.... l'eau n'est pas la solution... L'EAU N'EST PAS LA SOLUTION !

     Je plaque les oreilles en arrière, agacée par tout ce boucan. La nuit est un moment paisible, de tranquillité parfaite. J'aime apprécier son silence. Mais je ne compte pas abandonner cette chatte à elle-même. Elle est déjà aller trop loin. D'une voix glacée, je crache presque :

- Silence.

     Oui, c'est cela. Silence. Se taire. Écouter. Écouter le vide chanter. Elle est trop bruyante. J'inspire profondément et lentement pendant qu'elle se convulse sur le sol, haletant comme si quelqu'un ou quelque chose l'étranglait. En réalité, elle s'étrangle elle-même. Je me couche à un mètre d'elle, calmement. Je ne rentrerai pas tout de suite. Quoiqu'elle fasse, je resterai aux côtés de cette chatte pendant le reste de la nuit, jusqu'au lever du jour. Je ne peux pas la laisser seule. Son état ne le permet pas. J'inspire, expire. J'éloigne ses douleurs de mon propre corps sans les rejeter. Je calme mon rythme sur celui des arbres endormis. Elle est trop agitée pour le ressentir, mais je resterai. Même si elle devait mourir cette nuit, je resterai à ses côtés jusqu'à demain matin. La nuit ne dure jamais éternellement. la lumière revient toujours tôt ou tard. Patience.

Code par xLittleRainbow

Feat. Ice Blue

« L'hiver n'est qu'une création de nos esprits pour laisser s'échapper le froid de nos cœurs. »

Code par xLittleRainbow

Prends garde au coeur de glace...

Featuring Mhei

     Pendant un instant, il règne un faux silence, presque imperceptible, presque assourdissant. Je suis trop près, elle est trop près. Mais inconsciemment, je m'empêche de partir et m'oblige à rester. Presque inconsciemment. Je tente de me fermer, en vain. Je n'ai jamais vraiment su le faire, de toute façon. Je me demande encore ce qui a bien pu se passer dans ma tête en percevant sa présence, quelques temps plus tôt. Suis-je réellement persuadée que je peux aider ? Quel comportement affreusement banal et prétentieux. Un étrange dialogue sort alors de la bouche de la jeune chatte pâle :

- Que penses-tu Passie ? Tu crois que je contrôle tout ce qui se passe dans ma tête ? Que je choisis mes pensées ?

   J'attends presque une réponse, mais rien. La féline reprend alors :

- Je n'y peux rien. Toi tu sais qui je suis !

   Puis de nouveau rien. Une profonde lassitude semble alors l'envahir. Il me semble que le temps est suspendu en l'air, parce qu'elle est figée comme un cadavre. Parce que même la terre et l'eau croupie ont cessé de respirer. Peut-être même que moi aussi, pour ne pas troubler l'étrangeté de ce moment. Sans ma vision des auras, tout est étrangement sombre et silencieux, seul l'éclat froid de quelques étoiles dans le ciel me rappelle que tout ne s'est pas arrêté. Le froid glace le moindre mouvement. Le moindre de mes poils. Et pourtant, une voix, d'outre-tombe, brise cet état précaire de fausse sérénité :

- Mon nom. Mon nom c'est Mhei.

   Elle s'effondre. Sous son propre poids, sous le poids de sa fatigue désespérée. Je pousse un soupir, comme si je l'avais retenu pendant trop longtemps, pourtant si peu de temps. Je m'approche, mi-prudente, mi-conciliante. Est-elle consciente ? Inconsciente ? L'était-elle déjà avant..? Je m'approche encore, je dois me décider. Trois pas à peine, distance presque insurmontable. Alors que je m'allonge à son côté, posant ma queue étrangement courte sur son flanc, comme pour la protéger de la froide hostilité de l'extérieur. Puis, certainement par politesse, je réponds d'une voix calmement posée :

- Je suis Ice Blue.

   Alors je décide d'attendre. Attendre le jour et la lumière, attendre le soleil. Attendre que la vie s'empare à nouveau de son corps frêle. C'était une étrange conviction que je m'étais mise dans la tête que, une fois l'aube pointée, alors je n'aurai plus besoin de m'inquiéter pour la vie de cette chatte. Peut-être est-ce stupide ou alors sensé, peu m'importe. Je ne l'abandonnerai pas ici, dans ses ombres. Ça au moins, c'était sûr. Je sens alors que je me dois de lui ajouter, me souciant guère de savoir si elle m'entend ou non :

- Repose-toi à présent, l'obscurité et le froid disparaîtront bientôt. Je te le promets.

   Je lève une dernière fois la tête vers les minuscules lueurs de la voûte céleste, leur murmurant intérieurement de veiller sur cette flamme qui s'éteint. Je reporte mon attention vers le corps blanc crayeux. Rien de dure éternellement, pas même ta douleur.

Code par xLittleRainbow